Jésus chez son Père… de Fr Jorel François.

Jésus chez son père…

Jésus-avec son Père

…au temple de Jérusalem, avec Joseph et Marie, au milieu des docteurs de la Loi.

Lc 2, 41-52

 « Ne savez-vous pas que c’est chez mon Père que je dois être? ”

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Homélie dominicale de Fr Jorel François: Jésus chez son Père…

Version phonique:

Version écrite:

   Jésus chez son Père…

   ‟ Ne savez-vous pas que c’est chez mon Père que je dois être? ”

   Sœurs et frères, l’importance du rôle de l’épigénétique récemment mis en valeur alors même que le séquençage du génome venait d’être terminé rappelle une fois de plus que l’humain n’est pas un être déterminé. Il n’est déterminé ni par le milieu de sa naissance, par son pays, sa famille, ni par l’éducation reçue. Il est potentialité, ouverture. Mais en même qu’il n’est pas esclave des déterminismes sociaux, familiaux, éducatifs, ce serait se faire illusion que de penser qu’il est pure potentialité, uniquement ouverture, qu’il doive partir de rien, comme s’il devait tout inventer…

   Tout ouvert qu’il soit, l’homme reste tributaire de ce qu’il reçoit de son milieu d’origine, de son milieu social, sa famille, son éducation. C’est comme une dette qui le suit, et l’accompagne. C’est à partir d’elle qu’il construit et se construit, c’est à partir de ce lieu qu’il prend son envol pour s’ouvrir à plus, ou à l’inverse, se fermer, s’enfermer, s’aliéner en refusant de se désemmailloter pour grandir, en refusant de larguer les attaches pour devenir lui-même. S’il n’est donc pas vrai que l’homme soit déterminé, il reste vrai qu’il est conditionné. Le chemin qu’il doit s’inventer a un commencement et une fin. Sa liberté d’action, de création, et même sa liberté d’être ne sont pas absolues.

   Nous avons écouté la première lecture : Anne était une femme pieuse…Elle venait adorer, prier, supplier, demander à Silo, là où était posée l’Arche de l’Alliance, probablement chez un particulier, Élie qui en était devenu le surveillant, l’épiscope, le gardien…. Après l’avoir demandé, imploré, Anne conçut miraculeusement un enfant, et la voilà de retour, pleine de reconnaissance et de gratuité, elle est revenue à Silo pour remercier, elle est revenue avec l’enfant accomplir le vœu que ses lèvres avaient prononcé alors qu’elle le demandait (1 S 1, 11)…

   Samuel va devoir grandir à l’ombre de la tente-temple de Silo, sous la gouverne d’Élie, l’homme de Dieu ; imprégné de toute cette histoire qui le précède, qui est plus grande que lui, il va devoir apprendre à aimer Dieu, à écouter Dieu, lui parler, et savoir parler aussi de Dieu, être pour ainsi dire son porte-parole, son messager…Voilà ce que nous dit au moins en partie la première lecture en préparation à l’évangile…

   Et dans l’évangile, il est bien sûr question de Jésus, Bonne Nouvelle de Dieu pour les hommes, Évangile avec un grand E, Dieu fait homme pour le salut de l’homme.

   Abstraction faite de toutes les subtilités théologiques, restons au ras des pâquerettes.

   Supposons que Joseph fût charpentier, ou plutôt artisan, pour être plus près du texte biblique ; en écho à la première lecture demandons-nous : où voulons-nous que Jésus ait appris à travailler le bois, à se servir de ses mains, si ce n’était à l’atelier de Joseph?

   Cela dit, était-ce parce qu’il a appris à construire des maisons qu’il devait passer sa vie entière à le faire, à devoir équarrir le bois, clouer des chevrons et des linteaux, construire des faîtages, monter et démonter des portes, et des fenêtres…?

   Où voulons-nous que Jésus ait appris à passer du temps avec Dieu, à aimer parler des choses de Dieu, à rencontrer les humains, et s’ouvrir à l’étranger et l’accueillir, si ce n’est pour l’avoir vécu auprès de ses parents de la terre…?

   Nous le savons : ses mains d’artisan n’on pas fait que travailler le bois. Elles ont su aussi bénir, pétrir la terre pour faire de la boue pour guérir des aveugles… Elles ont même été étendues sur une croix, transpercées à cause du péché des hommes pour en libérer les hommes, leur restituer la liberté perdue.

   Nous le savons, ce n’est pas parce que Joseph et Marie étaient de bons fidèles, de pieux parents qui montaient tous les ans en pèlerinage au temple que Jésus devrait rester attaché, enfermé au temple de Jérusalem comme s’il était l’unique endroit où l’on pouvait rencontrer et adorer le Dieu de l’univers (cf. 1 R 8, 29)…

   Certes Jésus a aimé ce lieu, certes il a eu du zèle pour le temple, mais son amour ne l’a pas empêché de reconnaître sa relativité, sa caducité, et prédire sa destruction (Mt 24, 1) et l’avènement d’un autre, définitif, qui est le Règne même de Dieu (Jn 2, 19)…

   Et pour bien le montrer, il arrive que Jésus quitte ce temple de pierres pour aller prier le Père dans la Nature, sur la Montagne, à l’écart, dans le secret d’une Chambre, dans son Cœur. Son amour du bois et des pierres, appris sans doute dans sa famille, ne l’a pas empêché de voir en la nature un lieu de rencontre avec Dieu, cela ne l’a pas empêché de présenter l’humain comme le temple de Dieu, ce Dieu qui est Esprit. Et l’esprit, tel le vent, ne peut être enfermé, et l’esprit, tel le vent, souffle où il veut. Il souffle là où est l’homme, parce qu’il est ce qui anime l’homme et qui fait de lui un vivant qui vit de Dieu (Ac 4, 11; Ep 2, 20; 1 P 2, 4; 1 Co 3, 16; 6, 19).

   Il ne s’agit pas donc pas d’accabler nos familles, de tout leur mettre sur le dos par le fait même que chacun de nous peut toujours manifester une certaine liberté par rapport à ce qu’il y a reçu, mais en même temps parce qu’il n’est pas vrai que nous soyons qui nous sommes parce que nous nous sommes radicalement inventés, parce que nous nous sommes personnellement donné tous les moyens, pas moins qu’hier qu’aujourd’hui, c’est dans nos familles qu’il faut aller regarder pour souvent comprendre ce que nous avons comme société, comme église…

   Jésus, Marie, Joseph qui constituent ce que nous appelons «la Sainte Famille», sont donnés chaque année en exemple à nos familles… Si nous souhaitons, si nous voulons que nos familles et nos enfants grandissent dans l’amour de Dieu et du prochain, dans la liberté de l’Esprit, comme c’était le cas dans La Sainte Famille, nous sommes invités, dans nos familles, à parler de Dieu, à vivre de Dieu, de l’Évangile; nous sommes invités à montrer à nos enfants le chemin de l’Église, à les éduquer dans la liberté des enfants de Dieu, cette liberté qui n’est pas licence mais charité les uns pour les autres. Qu’il en soit ainsi. Amen.

                                                                          1 Samuel 1, 20-22, 24-28; 1 Jean 3, 1-2, 21-24; Luc 2, 41-52

Fr Jorel François op.

Lien vers la décoration florale du jour: Famille éternelle…