L’appel à se convertir… de Fr Benoît-Marie Simon.

L’appel de Pierre et André.

Appel de Pierre et André

Peinture de Duccio,  13°-14° siècle.

Mt 4, 12-23

 » Aussitôt, laissant leurs filets, ils le suivirent. « 

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Homékie du jour

de Fr Benoît-Simon: L’appel à se convertir….

Version phonique:

Version écrite:

L’appel à se convertir…               L’appel , l’appel

   Frères et sœurs, il n’y a pas si longtemps nous contemplions le mystère de la naissance de Jésus-Christ : Fils de Marie et Fils de Dieu. L’évangile que nous venons de lire nous introduit dans le mystère de la vie du Christ que lui-même a résumé devant Pilate en ses termes : je suis venu pour rendre témoignage à la vérité. Il n’est pas difficile de comprendre que la vérité en question est celle qui donne son sens ultime à notre existence. Et elle consiste en ceci : Dieu nous a créé pour nous inviter à entrer dans son Royaume, le Royaume des Cieux, qu’il ne faut pas confondre avec les royaumes de la terre.

   Voilà pourquoi le Christ, au fond, ne parle que du Ciel. Et c’est bien ce qu’on constate une fois de plus dans l’évangile d’aujourd’hui.

   Ce Royaume est synonyme de vie, mieux encore de vie éternelle ; de bonheur, mieux encore de béatitude ; de paix, mais qu’il ne faut pas confondre avec celle que donne le monde. Pourquoi, dans ces conditions, les hommes ont-ils crucifié leur Sauveur ? Le paradoxe est d’autant plus saisissant que Jésus n’a jamais rien fait d’autre que d’annoncer la bonne nouvelle, en prêchant. Certes, il a aussi, et c’est moins agréable, dénoncé ce qui nous empêche de le suivre : le péché. Mais c’est pour nous sortir de son enfermement mortifère, et nous montrer la voie du salut. D’autre part, jamais, dans l’Evangile, le Christ n’a obligé quelqu’un à l’écouter, encore moins à le suivre. Il n’est jamais intervenu dans des questions politiques. Il n’a pas non plus cherché à modifier les structures sociales… Bref, il s’occupe uniquement de la conversion du cœur ! Et pourtant il dérange, puisqu’on a voulu le faire taire en le supprimant. Seule explication : il dit la vérité, et la vérité oblige en conscience ; sans violence, mais d’une façon bien plus contraignante que ce qu’on impose par la force. Et chacun le sait, dans le secret de sa conscience. Voilà pourquoi ceux qui refusent de l’accueillir, veulent à tout prix l’empêcher de se faire entendre. Et tous les moyens sont bons : les mensonges, le dénigrement de ceux qui défendent cette vérité, en attaquant la personne plutôt que les arguments… Ne l’oublions pas : le diable est le prince du mensonge, et son pouvoir sur le monde, immense !

   Ainsi donc le Christ dérange uniquement parce qu’il nous rappelle que la seule chose qui compte c’est d’ouvrir notre intelligence et notre cœur à la réalité du Royaume des Cieux qui, en Jésus Christ, est présent parmi nous. Au vu des réactions violentes que cela déchaîne, force est de constater que ce Royaume dérange. Non pas parce qu’il promet la vie et la joie, évidemment ; mais parce qu’il n’est pas de ce monde.

   Eh bien, l’évangile d’aujourd’hui, souligne à sa façon l’abîme existant entre les espoirs ou les rêves humains les plus beaux, les plus profonds, les plus justes… et ce à quoi nous sommes invités en Jésus-Christ.

   Tout d’abord, parce qu’il insiste sur la nécessité de se convertir. Cela laisse entendre que, suivre le Christ demande, certes, des sacrifices, mais surtout que cela entre en contradiction avec nos zones d’ombre. Dès lors, laisser croire qu’on peut être disciple du Christ sans se repentir et changer de vie, est une imposture.

   Mais c’est surtout la vocation des apôtres qui confirme le fait qu’on n’entre pas dans le royaume, sans déchirement, et en allant simplement au bout de ce que nous vivons actuellement. En effet, Pierre et André, doive tout laisser, même leur père, pour suivre le Christ. Et il suffit de lire l’évangile, honnêtement, pour comprendre que la nécessité du détachement à l’égard des réalités terrestres n’est pas réservée à ceux que le Christ choisit pour être ses ministres !

   Mais comment tout lâcher. Comprenons bien que ce n’est pas le fruit d’un calcul humain, comme lorsqu’on se sépare d’un vieil ustensile pour un modèle plus performant. En effet, on peut imaginer que, pour Pierre et André, la promesse du Christ de faire d’eux des pécheurs d’homme est plus intrigante que vraiment passionnante ?

   Comme toujours, dans l’évangile, pour comprendre ce qui se passe, il ne faut pas oublier qu’un dialogue ne se compose pas uniquement de mots. Je viens de dire que cette confiance qui abandonne tout n’est pas de l’ordre du calcul. Elle n’est pas non plus un saut dans le vide, en fermant les yeux. Ne l’oublions pas, les deux premiers disciples répondent à l’invitation d’une personne concrète, qui est là devant eux, qui leur parle, certes, mais surtout qui les regarde de la façon bien particulière dont le Christ regardait ceux auxquels il s’adressait personnellement. Alors, ce qui pousse les apôtres à répondre, dans un acte de confiance absolue, ressemble à ce qui se passe dans le cœur de celle que son fiancé demande en mariage, pourvu qu’elle découvre en lui un amour vrai et profond. Avec cette différence, tout de même et de taille, qu’il s’agit non pas de fonder une famille humaine, mais d’entrer dans la communion très sainte et très pure des trois personnes de la Trinité !

   Frères et sœurs, tout est là : donnons-nous au Christ la possibilité de nous manifester son amour, celui dont le Père l’aime de toute éternité, dans la gloire du Ciel. Et, surtout, accepterons-nous de nous laisser librement emportés par l’élan qu’une telle révélation suscitera dans notre cœur ?

Fr Benoît-Marie Simon op.