« Le monde les a pris en haine »

16 mai 2021
Septième dimanche de Pâques, année B
Ac 1,15…26 ; Ps 102 ; 1 Jn 4,11-16 ; Jn 17,11b-19
Homélie du frère Damien Duprat

Dieu est amour, nous le savons bien, et les textes liturgiques d’aujourd’hui, comme ceux des deux derniers dimanches, nous parlent d’amour : l’amour de Dieu pour nous, notre réponse d’amour pour lui, l’amour entre nous. Mais aujourd’hui, un autre thème s’est invité dans les paroles de Jésus que l’Évangile nous a fait entendre : la haine. La haine du monde envers Jésus et ses disciples.

Pourtant, Dieu aime le monde, il l’aime tellement qu’il a donné son Fils unique. Comment ce Fils a-t-il été reçu dans le monde ? De façon double : il a été aimé, il a été haï. Aimé par les uns, haï par les autres, au point de le mettre en croix. Et ceux qui ont aimé Jésus ont été à leur tour aimés par les uns, haïs par les autres : la plupart des apôtres, autant que nous puissions le savoir, sont devenus des martyrs.

Comment se fait-il que Dieu, qui aime tout le monde, ne soit pas aimé par tout le monde ? Selon un triste constat que la tradition attribue à St François d’Assise, « L’amour n’est pas aimé ». D’où vient ce curieux paradoxe ?

Il y a le cas des personnes qui n’ont pas reçu une annonce satisfaisante et crédible de l’Évangile. Quelqu’un qui n’a jamais bénéficié d’un témoignage authentique de l’amour de Dieu, d’une manière ou d’une autre, n’a pas de raison suffisante de croire à cet amour. Il y a aussi bien sûr la prudence salutaire devant les diverses manifestations d’affection dont nous pouvons être l’objet. Nous savons bien que l’amour humain est souvent mêlé et n’est pas toujours entièrement bénéfique.

Mais il y a aussi l’étrange attitude qui consiste à résister à un amour dont on sait qu’il est bienveillant et bienfaisant. Le cœur humain est capable de se hérisser face à quelqu’un qui lui veut du bien. Sans doute, on cherchera alors à se justifier, en inventant des prétextes, en invoquant je ne sais quelle règle, ou pire, en cherchant des accusations contre celui dont on refuse l’amour… Tout cela, Jésus l’a subi, et non seulement lui, mais aussi un bon nombre de ses disciples à travers l’histoire. Une telle résistance ne sera jamais vraiment justifiée. Au fond, il n’y a pas de raison de s’opposer consciemment à un amour authentique.

La folie qui consiste à répondre à l’amour par la haine est d’abord le fait de celui que Jésus désigne comme le Mauvais. Il s’agit du Diable, cet ange qui aurait trouvé son bonheur à aimer le Créateur, et qui s’est pourtant révolté contre lui, entraînant dans sa chute beaucoup de ses semblables. Ce sont ces démons qui veulent entraîner l’humanité dans leur haine contre Dieu, et le monde, dans la mesure où il accepte ces séductions du Mauvais, s’oppose à Dieu.

C’est de ce monde-là que nous, nous ne faisons pas partie, depuis notre baptême. Mais c’est aussi précisément dans ce monde-là que Jésus nous envoie, bien que ce monde nous haïsse ou risque de le faire. Jésus nous y envoie, ce qui montre bien qu’il y a sans doute quelque chose à en tirer. Au fond, ce monde qui résiste à Dieu n’est pas délimité par des frontières entre les personnes. Ce monde, d’une manière ou d’une autre, nous le savons bien sans doute, il y en a quelque chose dans notre propre cœur. Jésus a la puissance de nous garder de ce monde et de convertir la partie de nous qui résiste encore à lui. Les persécutions auxquelles nous avons à faire face peuvent nous venir de notre entourage, mais aussi de nous-mêmes, puisque résister à Dieu, c’est aussi, d’une certaine manière, nuire à notre propre vie. Ce que veut Jésus, au fond, ce n’est pas nous retirer du monde, comme il nous le dit, mais nous garder du Mauvais, c’est-à-dire peu à peu nous entraîner à sa suite à ne plus être complices du mal. Il ne nous promet pas que nous ne subirons aucun mal ; en revanche, à coup sûr, il nous protège de devenir nous-mêmes complices du mal. Il nous envoie comme des brebis au milieu des loups, mais il nous donne aussi, par son Esprit Saint, la puissance d’être vainqueurs du mal par le bien.

© Jean-François Kieffer – 1000 images d’Évangile

Une réponse à “« Le monde les a pris en haine »”

  1. Bonjour Frère Damien,
    Je vous remercie pour cette homélie. Cela fait beaucoup de bien d’entendre que le Mauvais existe et qu’il est actif dans ce monde où beaucoup sont sourds. Mais ma plus grande joie est que notre Seigneur est tout puissant et surtout qu’il veille sur nous.
    J’ai eu le bonheur de passer cet après-midi avec vos frères et d’écouter l’histoire de votre ordre depuis le Moyen-âge jusqu’à aujourd’hui ainsi que de découvrir la vie de St Dominique.
    Peu disponible, je vais essayer de venir plus souvent.
    Bien fraternellement, Mme Zribi

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