Les apparences masquent la réalité

Prédication du frère Hervé Ponsot le 27 avril (sur Jn 6,22-29)


Les apparences et la réalité

Mes frères, chers amis en ligne, on vous l’a dans doute dit et redit « méfiez-vous des apparences » ! Mais vous auriez tort de penser que cette injonction se limite au physique ou à la tenue vestimentaire, cela concerne aussi les mots et les phrases. Ainsi, croyez-vous qu’Etienne, dont le procès est calqué sur celui de Jésus, aurait vraiment dit « que Jésus détruirait le lieu saint et changerait la loi de Moïse » ? Eh ! bien, il me suffit de parcourir les évangiles pour donner raison à ses accusateurs, Jésus a bien prononcé des paroles de ce type et Etienne a pu le suivre. Souvenez-vous « Détruisez ce temple et en trois jours, je le rebâtirai » ou bien « Moïse vous a dit que, et moi je vous dis… ».

Oui, Jésus comme Etienne ont sans doute prononcé les paroles qu’on leur a reprochées, mais cela ne saurait suffire à les condamner : les apparences masquent la réalité. C’est donc vrai pour ce qui concerne les personnes, mais c’est vrai aussi pour ce qui regarde les propos. On sait déjà qu’ils sont facilement manipulables lorsqu’on les retire de leur contexte, mais il faut dire qu’on doit les interpréter avec prudence même dans leur contexte. La question est bien connue, il s’agit d’aller au-delà de la lettre pour atteindre l’esprit. Saint Paul l’a dit dans une formule célèbre : « la lettre tue, l’esprit vivifie ».

Voilà quelque chose que nous avons bien du mal à mettre en application, en particulier dans un monde comme le nôtre où règne l’exigence d’immédiateté. Or, pour accueillir la parole de Dieu, il faut savoir prendre du temps et de la distance, voir la réalité au-delà des mots qui l’expriment. Aujourd’hui, avec l’évangile que nous avons entendu, l’accent porte sur la nourriture : que faut-il entendre par ce mot ? Pour la plupart des auditeurs de Jésus, la nourriture en question ne peut être que matérielle. C’est elle dont ils ont bénéficié, et c’est elle qui est donc à nouveau attendue : comment ne pas le comprendre lorsque les ventres sont affamés ?

Mais l’évangile ne nous dit pas que ce soit maintenant le cas, et il faut donc accueillir la parole de Jésus sur un autre plan, au second degré diront certains : la nourriture dont parle Jésus est d’ordre spirituel et se trouve dans son enseignement. Et nous devons sans cesse nous souvenir de cette exigence de lire la parole de Dieu à tous les niveaux où elle s’exprime, pas simplement dans son sens littéral.

Pour pouvoir transmettre cette parole dans toute sa fraîcheur et sa force, pour que notre parole soit crédible, ne devons-nous pas comprendre pleinement nous aussi que la réalité se trouve au-delà des apparences ? Voilà justement à quoi nous allons être appelés encore une fois dans la suite de notre célébration eucharistique.

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