Trois en Un…, de Fr Arnaud Blunat.

Trinité de Roublev

Trinité de Roublev

Jn 3, 16-18

« Que la grâce du Seigneur Jésus Christ, l’amour de Dieu
et la communion du Saint-Esprit
soient avec vous tous. »

Homélie dominicale de Fr Arnaud Blunat:

Version phonique :

Version écrite:

Trois en Un…
            La Trinité fait partie de notre vie, elle rythme notre prière, elle est notre respiration quotidienne. Loin d’être une théorie abstraite, une équation insoluble, elle est le mystère du Dieu qui vient à notre rencontre. Et qui, par sa présence, irrigue toute notre existence.
            Sainte Elisabeth de la Trinité, jeune carmélite morte à 26 ans, quelques années après Sainte Thérèse de Lisieux a écrit une magnifique prière qui commence ainsi :
« O mon Dieu, Trinité que j’adore, aidez-moi à m’oublier entièrement
pour m’établir en vous, immobile et paisible, comme si déjà mon âme était dans l’éternité! »
La Trinité sainte, c’est notre demeure, notre maison, notre chez nous. Dieu est bien quelqu’un, quelqu’un qui nous aime, parce qu’il veut vivre avec nous et en nous, pour  toujours.
« Tu nous as fait pour toi et notre cœur est sans repos tant qu’il ne repose en toi » disait également Saint Augustin.
Oui, le Dieu unique et trois fois saint est le Dieu qui marche avec nous, le Dieu qui nous libère et le Dieu qui nous envoie.
            Dès les origines de l’homme, Dieu marche avec les hommes. Il a appelé Abraham à quitter sa famille pour aller vers le pays qu’il lui indiquerait. Il s’est invité chez lui et lui a annoncé la naissance d’un fils. La promesse d’une descendance innombrable allait s’accomplir avec Isaac, puis Jacob et ses fils. En faisant route avec nous, Dieu nous appelle à la confiance. Il partage nos épreuves, nos joies et nos peines. Chemin faisant, il donne sens à notre vie. Comme avec les disciples d’Emmaüs, il relie les Ecritures et se révèle dans le pain de vie. Ce Dieu fait de nous des fils en se révélant comme un Père, plein d’attention, de tendresse et de miséricorde.
            Dieu marche avec nous pour nous rendre libres. Dieu est libérateur. En conduisant son Peuple de la terre d’esclavage à la liberté, en le faisant traverser le désert, Dieu se révèle comme celui qui vient le sauver de la mort. Il nous libère de tout ce qui nous encombre, tout ce qui nous empêche de le reconnaitre. L’expérience du veau d’or montre combien grands sont ces attachements à ces fausses représentations du bonheur. Á ces contrefaçons de l’amour. A Moïse qui lui demande de lui montrer sa gloire, Dieu répond qu’il est le Dieu lent à la colère et plein d’amour, qui vient pour pardonner et non condamner. Le séjour de 40 ans au désert, c’est une véritable pédagogie. Dieu veut nous apprendre à vivre en hommes libres. Et pour cela, il nous permet de prendre conscience de nos égarements, il vient visiter nos cœurs, il  vient sonder nos consciences, il nous fait vivre l’épreuve de la solitude quand on est loin de lui. La fausse liberté se paye souvent cher. Mais l’expérience du retour nous marque en profondeur. Dieu est un Père qui se laisse chercher mais aussi un Dieu qui se met à notre recherche. Qui sort à notre rencontre. Jésus nous l’a bien fait comprendre dans la parabole du fils prodigue.
            Dieu marche avec nous, il nous libère, mais aussi il nous envoie. Tous ceux qu’il appelle à lui, il inscrit en eux son sceau, sa marque propre, son Esprit Saint. A la fois, il les introduit dans sa vie même, dans sa propre demeure, mais aussi il les envoie, pour témoigner, pour faire rayonner sa présence, pour inviter les autres à le connaitre. Moïse a reçu cette mission de conduire son peuple, préfigurant le Christ qui est venu pour rassembler les enfants de Dieu dispersés. Si nous sommes baptisés, c’est pour être des porteurs de vie et d’espérance dans notre monde.
            Vous le voyez, notre Dieu n’est pas un Dieu lointain, statique, impersonnel. C’est un Dieu proche, vivant, infiniment présent. Mais il faut pour cela l’accueillir en nous, lui laisser toute la place, le laisser habiter notre cœur et notre intelligence.
Permettez-moi de le dire de manière humoristique en utilisant trois images : Le Dieu Trinité fait de nous des marcheurs, des plongeurs et des danseurs.
            Nous l’avons vu, Dieu marche avec nous et fait de nous des marcheurs. Il nous invite sans cesse à le suivre, à aller de l’avant. En marchant à nos côtés, il n’hésite pas à nous faire faire un détour, comme Moïse au buisson ardent. Il nous propose d’aller toujours plus loin dans la connaissance de nous-mêmes, sur ce chemin de conversion. Il nous apprend à nous dépouiller du vieil homme qui est en nous, et s’il nous fait passer par la croix, c’est pour avoir part à la résurrection. Quelque soit la rudesse du chemin, il sera toujours avec nous et jamais ne nous abandonnera.
            Dieu fait de nous des nageurs, il nous apprend à nager en eau profonde, en nous immergeant dans l’océan de son amour. Comme le dit Saint Bernard, la mesure de l’amour c’est un amour sans mesure. L’amour de Dieu est un océan sans fond. Le Dieu Trinité n’a ni commencement ni fin, il est un jaillissement perpétuel de vie et d’amour. Il révèle ainsi la Vérité en se donnant lui-même, en se plongeant dans notre humanité, pour nous plonger dans sa divinité et nous donner part à sa vie éternelle.
            Enfin, Dieu fait de nous des danseurs, en nous invitant à entrer dans la danse. Car l’image qui convient le mieux pour parler de la vie trinitaire, pour caractériser les relations des trois personnes divines entre elles, c’est celle de la danse. La vie de Dieu est un mouvement perpétuel qui associe le Père, le Fils et l’Esprit dans une harmonie parfaite. Ce qu’on appelle en grec la périchorèse, c’est ce mouvement circulaire qui va de l’intérieur vers l’extérieur, dans la paix, la joie et l’unité. Par cet apprentissage de la chorégraphie divine, nous trouvons notre équilibre intérieur.
            La vie trinitaire, c’est donc cette plénitude de vie et d’amour à laquelle au fond nous aspirons, pour laquelle nous sommes faits, c’est cette vie que nous recevons au baptême et s’épanouit dans nos vocations respectives.
Ainsi en s’aimant de l’amour même de Dieu, les époux entrent dans ce mouvement d’accueil et de don, ils développent ce souci constant de faire la joie de l’autre. Ils se préparent à vivre le mystère des noces éternelles.
Les consacrés puisent leur force d’aimer tous leurs frères, dans l’amour de Jésus pour son Père, dans ce don qu’ils font de leur vie, pour être signe du royaume qui vient.
Ceux et celles qui vivent seuls peuvent néanmoins vivre cette expérience de la présence de Dieu, s’ils laissent leur porte ouverte pour vivre le partage et la fraternité.
            La Trinité peut ainsi se résumer : Dieu vient vers nous par son Fils pour nous dire qu’il est notre Père, dans l’Esprit d’amour qui rassemble et unifie.
Ou mieux encore par cette invitation de Saint Paul que nous avons entendue :
« Que la grâce du Seigneur Jésus Christ, l’amour du Père
et la communion du saint Esprit
soient toujours avec vous ».
Fr Arnaud Blunat op.
Lien avec la liturgie florale : Aimer plutôt que juger.