Lundi 9 novembre 2020 – Fête de la Dédicace de la Basilique du Latran
Ez 47,1…12 ; Ps 45 ; Jn 2,13-22
Homélie du frère Jean-Marc Gayraud
La question de la destruction du temple et de sa reconstruction dans le Corps du Christ renvoie à un bouleversement radical concernant le lieu de présence de Dieu chez les hommes. Jésus est le nouveau temple, en qui demeure la plénitude de l’Esprit. Il est devenu, par sa mort et sa résurrection, le sanctuaire de la Présence divine.
Présence du Ressuscité au milieu des siens, qui sauve et qui recrée. La réconciliation avec Dieu ne s’opère plus désormais par les sacrifices prescrits par la Loi mais par le don que Jésus fait de lui-même et par l’envoi de l’Esprit. Union au Christ, vie dans l’Esprit font loi désormais. C’est par la sanctification personnelle et communautaire que s’opère la réconciliation avec Dieu.
Les anciennes frontières séparant le sacré du profane, le divin de l’humain, la sainteté du péché, volent en éclat. Nous changeons de religion à vrai dire même si, il faut le préciser, l’ancienne Alliance portait déjà en elle une telle nouveauté si radicale.
Dieu est présent au plus quotidien, au plus commun de la vie des hommes, en tout temps et en tous lieux. Il l’est au plus intime de son être et de sa vie. Il est présent là où la pensée humaine et religieuse avait cru devoir le mettre à l’écart parce qu’il ne pouvait pas y être chez Lui. Et il y a bien plus encore, car c’est jusqu’à l’inconcevable qu’il s’est rendu présent chez les hommes : là-même où règne péché, impureté, haine, violence, folie. Au point que pour le chrétien, c’est cette présence-là qui constitue la caractéristique incomparable du Dieu auquel il croit.
L’Evangile auquel nous croyons nous ouvre à un insaisissable insensé bien plus qu’à quelques certitudes qui en épuiseraient le sens. Il nous engage à exister toujours autrement, hors toute habitude acquise et fatiguée. L’Evangile est toujours différent de ce que nous avions cru comprendre de lui. Il nous invite à une découverte chaque fois plus inédite, un jamais encore entrevu jusque-là. Il ne devrait jamais cesser de nous retourner de l’intérieur. Il ne devrait jamais finir de nous surprendre, devenant ainsi l’Evangile vivant de notre vie. Mais précisément, ceci engage tellement notre vie que nous préférons en rester à la vision d’un Dieu bien domestiqué par nous et rendu par-là tout à fait inoffensif.
Contre ce Dieu inoffensif, Jésus a un jour pris un fouet et renversé tout sur son passage. Soyons-en les premiers secoués, à en être blessé s’il le faut. Et être ainsi profondément remis en question. Mais c’est bien pour que chaque jour nous voie plus émerveillé que jamais devant l’inépuisable et toujours surprenante nouveauté de l’Evangile.