Jugement Divin… ou Miséricorde de Dieu? de Fr Benoît-Marie Simon.

Jésus juge, ou sauveur du monde

Jésus Sauveur du monde

Jn 3, 14-21

 » Dieu a envoyé son Fils dans le monde, non pas pour juger le monde,
mais pour que, par lui, le monde soit sauvé.
« 

 

Homélie dominicale de Fr Benoît-Marie Simon:

Version phonique:

Version écrite:

   Jugement divin… ou miséricorde de Dieu ?

   « Dieu n’a pas envoyé son Fils pour juger le monde« . Quel soulagement ! Oui, mais, tout de suite après, on lit : « qui ne croit pas en Lui, est déjà jugé« . Et encore : « Et tel est le jugement : la lumière est venue dans le monde et les hommes ont mieux aimé les ténèbres que la lumière, car leurs œuvres étaient mauvaises…« .

   Décidément, cela n’est pas clair ! Faut-il, oui ou non, s’attendre à un jugement de la part de Dieu ? On trouve, dans l’Evangile, des textes qui insistent sur la miséricorde de Dieu et son désir de sauver tous les hommes, gratuitement. Malheureusement, il y a d’autres passages qui rappellent, qu’à la fin des temps, « Dieu séparera les gens les uns des autres ». Et il dira aux uns : « Venez les bénis de mon Père, recevez en héritage le Royaume…« , et aux autres : « Allez loin de moi, maudits, dans le feu éternel…  » (Mat. 25, 41 ss.).

   Normalement, lorsqu’on rencontre, chez un auteur, des contradictions, on en conclut que sa pensée se cherche. Et qu’il faut choisir sa formulation définitive. Mais, peut-on faire la même chose, s’agissant de la Bible ?

   Tout dépend de la réponse à cette question : l’Écriture a-t-elle Dieu pour auteur, oui ou non ?

   Pour nous, la question est tranchée, puisqu’à la fin de chaque lecture, à la messe, on conclut : Parole de Dieu. Cela prouve bien que l’Église a toujours cru que, tout particulièrement dans l’Evangile, Dieu Se révèle à nous, directement.

   Bien sûr, Dieu n’a pas écrit matériellement ces textes que nous lisons. Il a inspiré des individus concrets, en se servant de leurs talents et de leurs singularités, et il n’est pas question de l’ignorer. Il n’empêche, Dieu est Tout puissant. Par conséquent, pour peu qu’Il le veuille, Il arrivera toujours à faire en sorte que ce qui est écrit exprime vraiment et parfaitement ce que Lui, Dieu, a l’intention de révéler, et non pas ce que les auteurs inspirés ont compris ou ressenti, en écoutant le Christ prêcher et en le voyant vivre.

   D’autre part, sa pensée ne se cherche pas. Et, puisqu’il nous parle de son mystère éternel et des secrets de son royaume qui n’est pas de ce monde, le sens profond des écritures transcende la culture de l’époque, ainsi que la nôtre. D’ailleurs, si ce n’était pas le cas, en lisant l’Évangile, on ne pourrait pas être attiré par le Christ élevé de terre, on resterait rivé à ce monde qui passe ?

   Dans ces conditions, les pères de L’Église ont raison d’enseigner qu’il faut éclairer un passage de l’Écriture par un autre passage de l’Écriture, et non se laisser guider par notre sentiment personnel, nos théories, nos convictions intimes.

   Tout ceci pour dire qu’on ne peut pas opposer miséricorde et jugement. Plus précisément, on ne peut pas s’arrêter à l’une en excluant l’autre. On est condamné – c’est le cas de le dire – à les penser ensemble, c’est-à-dire à comprendre que l’un ne s’explique pas sans l’autre, et réciproquement.

   Vous entendrez, sans doute, sur ces questions, des voix discordantes. Alors, si, au moins, j’ai pu vous convaincre qu’on n’a pas le droit de faire comme si la miséricorde était incompatible avec le jugement, c’est déjà beaucoup.

   Mais, pour vous aider à aller plus loin, c’est-à-dire à les penser ensemble, une petite remarque sur la notion de jugement, en guise de conclusion.

    Un juge humain applique, de façon plus ou moins rigoureuse, une loi qui dépend de la volonté des hommes. Rien n’empêche, par conséquent, d’imaginer que, si on supprimait les lois sévères et qu’on usait du maximum de bienveillance, on pourrait ne jamais condamner personne. Or, Dieu est le juge suprême, et sa miséricorde est sans limites. Alors, pourquoi n’absoudrait-il pas tout le monde !

   Pour sortir de ce dilemme, il faut comprendre que le jugement divin ressemble plus à une vérification, qu’au droit de grâce réservé au souverain. Prenons un exemple. Après avoir subi un entraînement pour apprendre à sauter en parachute, vient le moment où il faut sauter, et c’est l’instant de vérité, celui où on va juger si vous êtes prêt ou non. Là, vous le comprenez sans difficulté, aucune indulgence ne couvrira le fait que vous n’êtes pas prêt. Eh bien, pour entrer dans la vie éternelle, il faut être capable de se laisser emporter dans l’amour trois fois saint et trois fois pur de Dieu. Le fait que c’est notre liberté qui doit être prête, ne change rien à l’affaire. Et, en quelque sorte, Dieu ne peut que constater si notre cœur a ou n’a pas la douceur, la pureté, l’humilité nécessaires.

   Aussi sainte Catherine de Gêne affirme-t-elle dans son traité sur le purgatoire . « Le ciel n’a pas de porte, et peut y entrer qui veut, car Dieu est toute bonté ; mais la divine essence est si pure, que l’âme ayant en soi un empêchement, se précipite elle-même dans le purgatoire et y trouve cette grande miséricorde : la destruction de cet empêchement » (chap. IX).

   En clair, le Christ ne se contente pas de proposer des soins palliatifs, Il nous offre le salut véritable.

   Pensons à tout cela, lorsque, dans quelques instants, en récitant le Credo, nous proclamerons que le Christ viendra, à la fin des temps, « juger les vivants et les morts« …

Fr Benoît-Marie Simon op.

Lien vers la décoration florale du jour: La lumière qui éclaire « la bonne route ».