La colère de Dieu

4 décembre 2022 – 2è dimanche de l’Avent, année A
Is 11,1-10 ; Ps 71 (72) ; Rm 15,4-9 ; Mt 3,1-12
Homélie du frère Jean-Marc Gayraud



Du film « Jésus de Nazareth » de Franco Zeffirelli (1977)

Le temps de l’Avent, c’est le temps de l’éveil, du réveil, de la vigilance. Eh bien, avec Jean-Baptiste, on est servi, c’est un réveil en sursaut qui se produit ! Si le but était de nous faire sortir de notre somnolence confortable, notre insouciance tranquille, on peut dire que c’est réussi. Les accents tonitruants du Baptiste sont en effet ceux des prophètes, d’Élie en particulier, de ces hommes de feu qui secouèrent sérieusement les fâcheuses tendances d’un peuple à oublier son Dieu et à se laisser aller. Et voici que gronde à travers eux la colère de Dieu, oui, la colère de Dieu.

La colère de Dieu est l’expression de ce refus de l’inéluctable destin de mort dans lequel l’homme s’enfonce lui-même. Destin de mort que celui de l’homme laissé à sa vanité, son incroyable légèreté, sa cruauté, son aveuglement et à sa suffisance. Mais Dieu qui ne se moque pas de nous ne peut se résoudre à ce constat d’échec, il ne peut se résoudre à nous perdre. Il vient nous sauver Lui-même et il doit aussi nous sauver de nous-même. La colère de Dieu est l’expression de sa sainteté confrontée au péché de l’homme. Elle est le revers douloureux de son amour inconditionnel.

Il n’est pas difficile d’égrener quelques-uns de ces maux qui mettent Dieu en colère parce qu’ils mènent l’homme à sa perte : l’absurdité de la guerre, les terribles manquements au respect sacré de la vie, la réduction dramatique des relations humaines à leur valeur mercantile, le consumérisme pour tout horizon de vie, les formes nombreuses d’esclavage comme l’exploitation des enfants, l’expansion incontrôlée de la pornographie et de la prostitution, le délitement progressif du sens moral et d’une certaine rectitude intérieure, l’invasion tous azimuts d’une civilisation du jeu et du divertissement, véritable chloroforme pour la conscience humaine, les situations d’injustice qui s’installent et se perpétuent, le contre-témoignage de témoins supposés de l’Évangile, un égoïsme obstiné qui rend aveugle sur les nécessités du prochain, la surdité aux appels de Dieu provoquée par mon propre péché. Quel Dieu serait Celui-là qui pourrait s’accommoder de telles dérives mortelles ? La sainte colère de Dieu nous garantit que ce n’est en rien le cas. Et nous, nous avons grandement besoin de Jean-Baptiste pour nous réveiller et entendre gronder cette colère.

Et tant pis si elle nous secoue sans ménagement, ou plutôt tant mieux. Il nous est impératif d’entendre cette voix criée dans le désert, ce désert de toutes les purifications et de toutes les conversions. C’est là qu’il convient de préparer le chemin du Seigneur en nos cœurs, que doivent être rectifiées nos intentions les plus profondes, qu’il est possible de produire un fruit digne de conversion, de se rendre disponible à la grâce de Dieu. Au désert, nous réalisons quelque peu jusqu’où nous nous étions égarés loin de Dieu et, plus encore, jusqu’où nous sommes aimés de Lui.

« Voici qu’il vient » clame le Baptiste. C’est maintenant le temps de se retourner et de lui faire hospitalité. Il s’agit d’héberger en notre vie Celui qui peut la transformer. Car sa présence est paix et joie pour qui est disposé à changer de cap, à vivre une véritable révolution intérieure, à renoncer à cette vie mortelle, au mortel de cette vie, et se décider pour la vie vivante. Et il ne faut plus différer le moment, sa venue est imminente. Ce temps qui passe vite nous donne juste le temps qu’il faut pour nous préparer à l’accueillir. Soyons donc prêts pour cela au détachement qu’implique un tel engagement. Soyons prêts pour cette heureuse rencontre : elle est vie éternelle.

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