Le saint au balai

3 novembre 2020 – Fête de saint Martin de Porrès, o.p.
Isaïe 58,6-11 ; Matthieu 11,25-30
Prédication du frère Hervé Ponsot

« Allez, donnez donc un coup de balai par ici ». Frères et sœurs, en prononçant ces mots, je ne vous invite pas au dégagisme, je ne désigne personne à votre vindicte, je rappelle simplement une phrase que notre frère Martin de Porrès, que nous fêtons aujourd’hui dans l’Ordre des Prêcheurs, a dû entendre à plusieurs reprises dans sa vie.

En effet, après une éducation reçue dans un milieu très pauvre, Martin fut accueilli dans l’Ordre comme tertiaire ; invité ensuite à devenir frère coopérateur, autrement dit non prêtre, il demanda et reçut les tâches plus humbles. Il fut traité comme les coopérateurs l’étaient à l’époque, et parfois encore aujourd’hui, sans ménagements. Et l’outil avec lequel on le représente très souvent est un balai !

Les humiliations, il en a donc connu dans la vie religieuse, mais aussi avant même d’y être entré, dans la mesure où il était né d’une rencontre hors mariage d’un seigneur de haut rang et d’une esclave noire. Il aurait pu concevoir de tout cela une grande amertume, et il n’en fut rien : homme de profonde prière, homme de partage, il prit le joug qui lui échut comme un partage de celui du Christ. Il mit rigoureusement en application la consigne qu’évoque Isaïe : « Ce que le Seigneur exige de toi, n’est-ce pas partager ton pain avec l’affamé, héberger chez toi les pauvres sans abri, si tu vois un homme nu, le vêtir, ne pas te dérober devant celui qui est ta propre chair ? ». Et très vite, « sa lumière éclata comme l’aurore », et il fit des miracles de plus en plus nombreux, qui lui attirèrent la reconnaissance des humbles comme des puissants.

Une telle figure, aujourd’hui très populaire en Amérique du Sud, comme dans le monde entier, peut nous apparaître comme un exemple inatteignable. Mais Martin n’a rien fait d’extraordinaire : comme beaucoup d’autres saints, il a patiemment transfiguré l’ordinaire, avec le soutien de l’Esprit du Seigneur accueilli dans la prière.

La sainteté est un appel et un chemin, qui se parcourt lentement au long d’une vie, souvent par la mise en œuvre de l’une ou l’autre de ces béatitudes qui nous ont été lues dimanche pour la fête de la Toussaint. Martin a connu et vécu celle de la pauvreté, sans doute pouvons-nous aussi en vivre l’une ou l’autre, avec constance : ce sera notre chemin de sainteté.

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