Le témoignage de Jean le Baptiste… de Fr Jorel François.

Le témoignage de Jean le Baptiste.

Jean le Baptiste témoigne...

                                       Matthias Grunewald. St Jean-Baptiste.                                      Retable d’ Issenheim – Panneau de droite – Musée de Colmar

Jn 1, 29-34

 » Moi, j’ai vu, et je rends témoignage : c’est lui le Fils de Dieu « . 

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      Homélie dominicale

de Fr Jorel François: Le témoignage de Jean le Baptiste…

 

Version phonique:

Version écrite:

Le témoignage de Jean le Baptiste…

   Un témoin doit-il se taire ? Son rôle n’est-il pas de témoigner ? et le témoignage réduit-il à la déclamation, à la confession des lèvres?

   Un témoin, c’est littéralement quelqu’un qui a assisté à quelque chose, ou pour l’avoir vu, entendu, ou pour y avoir touché, goûté ou/et pour l’avoir senti. Le témoignage a donc quelque chose à voir avec l’un ou l’autre ou même avec plusieurs de nos sens à la fois.

   Pour avoir vu et/ou goûté et/ou touché et/ou senti, pour avoir fait l’expérience de ceci ou de cela, on se sent habilité à en parler, ou encore on est même parfois appelé, fortement invité, pressé de le faire. Témoigner oblige de rester au plus prés de ce que l’on a vu, touché… pour être dans la vérité, et en parler pour faire en sorte que ceux qui n’ont pas vu, entendu… ce que soi-même a vu, entendu… puissent y goûter en quelque sorte, y participer, et devenir eux-mêmes des témoins indirects.

   Rendre témoignage suppose avoir rencontré, avoir touché ou avoir été touché, avoir fait une expérience personnelle dont on a conscience. Il y va de la crédibilité de ce que l’on tente d’exprimer, de restituer, de balbutier aux autres. Et la force même du témoignage dépend de la qualité de cette expérience, de la conscience que l’on en a. Le témoignage est alors porté par et donné à partir de cette expérience, c’est en elle qu’il prend sa force et sa source. Autrement on est dans l’affabulation, dans la supputation, l’imposture et le mensonge.

   Mais le témoignage chrétien se résume-t-il à cette opération, peut-il se limiter à la confession des lèvres d’autant plus que la majorité d’entre nous parlons, témoignons de ce que nous n’avons pas vu mais seulement entendu dire : des témoignages de seconde, de troisième, de quatrième…main. Comment alors, chrétiens d’aujourd’hui, témoigner de ce que nous n’avons pas vu mais seulement reçu d’autres, qui eux-mêmes l’avaient reçu d’autres et ainsi de suite?

   Un chrétien est un consacré. Par le baptême, nous sommes morts et ressuscités avec le Christ; nous avons été mis à part pour Dieu. Cette mise à part est une consécration, qui est en même temps source de mission, une consécration qui est en elle-même une mission. Nous avons été rejoints chacun là où nous étions, nous avons expérimenté l’amour de Dieu et nous ne pouvons ne pas en rendre témoignage. L’amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs et a fait de nous des témoins. Cet amour nous presse.

   Témoigner est donc la mission du baptisé, mais avant tout de toute l’Église. C’était déjà celle du peuple de la bible : le peuple d’Israël.

   Dès le départ, Israël a fait l’expérience d’un choix, d’un amour de dilection. Avant même qu’il ne fût un peuple, il a expérimenté et compris qu’il est aimé et choisi par Dieu pour témoigner de sa bonté à toutes les nations de la terre (Is 49, 5-6). Mais si Dieu est fidèle, l’homme est inconstant et infidèle. Israël s’est enfermé sur lui-même, il s’est emmuré dans des prescriptions et a vécu sa consécration non comme pour témoigner du don gratuit de Dieu mais comme une finalité. Comme si sa consécration relevait de ses mérites, il a méprisé les autres peuples, anathématisé les pécheurs et les a empêché d’accéder à la bonté de Dieu. Son témoignage se fit alors contre témoignage…

   Vint Jean le Baptiste : un prophète de la lignée de tous ces prophètes qui n’ont jamais cessé de rappeler au peuple de la bible ce pourquoi il a été mis à part. Jean-Baptiste, le plus grand des enfants des hommes, a fait de sa vie un témoignage. Toute son activité missionnaire vise à concilier les cœurs, à ramener Israël à Dieu et avec lui toutes les nations de la terre. Son témoignage concourt à faire reconnaître la bonté du Dieu qui pardonne et qui ne veut qu’un seul pécheur soit perdu. D’ailleurs n’est-ce pas pour cela qu’il a envoyé son Fils dans le monde ? 

   Et c’est pour que le Fils de Dieu soit manifesté au monde que Jean Baptiste est venu (Jn 1, 31). C’est aussi pour cela qu’il donna le baptême de repentance. Jean a vu, il a cru et il témoigne. Il n’a pas cherché à tout ramener à lui alors qu’il aurait pu très bien le faire. Selon Flavius Josèphe, beaucoup de Juifs venaient à Jean au point que Hérode eut peur et l’emprisonna.

   Jean ne s’est pas fait passer pour l’agneau de Dieu. À ceux qui lui demandaient s’il était le messie (Jn 1, 19-20), il suffirait qu’il réponde « oui je le suis » pour donner le change, et brouiller les pistes. Il aurait couru le risque d’être cloué comme Jésus, mais qu’importe si le monde entier ou presque avait cru que c’était lui qui devait venir; et puis de toute façon, sans avoir été le messie, il a eu la tête tranchée!

   Le témoin, c’est donc quelqu’un qui témoigne de ce qu’il a expérimenté, c’est un consacré, mais aussi un martyr. Tout homme qui souffre pour une cause qui fait grandir le genre humain est en quelque sorte un martyr, un consacré, un témoin. La souffrance, qui n’est jamais bonne en soi, que l’on ne doit pas appeler de ses vœux, peut alors se transformer en consécration; la souffrance peut devenir un lieu d’apostolat, de mission. Toute souffrance, unie à celles du Crucifié, peut devenir témoignage, source de fécondité, lieu de manifestation du Royaume.

Fr Jorel François op.

Lien vers la décoration florale du jour: L’Agneau qui enlève le péché du monde...