Miracle de la rencontre… de fr Jorel François.

Miracle de la rencontre…

Jésus rencontre Zachée-

Jésus rencontre Zachée à Jéricho.

Lc 19, 1-10

 » Le Fils de l’homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu « .

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Homékie du jour

 

de fr Jorel François : Miracle de la rencontre…

 

 

Version phonique:

Version écrite:

Miracle de la rencontre.

Zachée est un personnage peu fréquentable.

   Zachée est un personnage bien connu de l’évangile; un personnage peu fréquentable, mal famé, un chef de collecteurs d’impôts (archi telonès). Il est d’autant plus peu fréquentable que personne n’aime payer l’impôt et encore moins à un État qui n’est pas le sien, à un État étranger, injuste et prédateur…

   Chef de collecteurs d’impôts à Jéricho, Zachée collabore avec Rome. Il fait en sorte que ses compatriotes rendent à César ce qui est à César, et peut-être davantage. On sait comment cela se passait : Rome répartissait les endroits relevant de l’empire en secteurs et les attribuait à des personnages ayant autorité de lever des impôts. Ces derniers avançaient de l’argent à la métropole qu’ils récupéraient par la suite sur la population locale avec force bénéfices. Zachée était donc de ces gens, qui travaillaient pour le système et qui contribuaient à son efficacité. Et l’évangéliste précise qu’il était riche (plousios).

   Collabo de l’empire, pour ses compatriotes qu’il extorquait et spoliait, Zachée faisait évidemment partie de ces traîtres dont on croise en regardant de l’autre côté de peur que son regard ne croise le leur. Zachée était publicain, c’est-à-dire, dans le cadre du Nouveau Testament, un pécheur public, il faisait partie de ces genres de personnes que ses compatriotes souhaitaient voir terrassées, englouties par les feux du ciel.

  Zachée n’était alors pas aimé. Pourtant son chemin a croisé celui de Jésus

   Zachée n’était alors pas aimé. Pourtant son chemin a croisé celui de Jésus; il avait entendu parler de lui. Alors que Jésus passait par Jéricho, Zachée cherchait donc à le voir (ezetei idein).

   Voir (idein), c’est déjà un verbe très important dans la théorie platonicienne de la connaissance. C’est même de ce verbe que découle l’idée de contemplation (theoria) si chère aux Anciens, la contemplation qui donne accès à la connaissance, la vraie connaissance, la sagesse. Et si au ciel, selon une certaine approche théologique, il sera question de fruition, de jouissance, pour d’autres, il sera question de vision (de contemplation) béatifique, parce que nous ne verrons plus Dieu comme à travers un nuage d’inconnaissance mais tel qu’il est.

Zachée veut découvrir la nature profonde de Jésus.

   Zachée veut voir, comprendre alors qu’il veut savoir qui est cet homme (tis estin) de qui il a entendu parler. Il veut voir par lui-même, pour pénétrer sa réalité, confronter sans doute les on-dit colportés avec la réalité, et ainsi faire la part entre les stéréotypes, les clichés, faire la part entre l’opinion et la vérité : faire œuvre de science. Zachée prend l’initiative de chercher à voir, pour découvrir la nature profonde Jésus, et contempler.

   Mais petit de taille, au sens propre comme au sens symbolique du terme (on est toujours petit face au mystère ineffable et insondable de Dieu, son identité, sa nature…), Zachée réalise qu’il n’est pas à la hauteur de l’entreprise. Il risque d’être gêné… par la foule (ochlon), qui peut faire obstruction à sa vision. Aussi grimpe-t-il – par-delà la foule, aussi transcende-il le tumulte de celle-ci qui peut couvrir la voix, la parole de Dieu…

Zachée croyait avoir pris l’initiative, et se faire sa propre idée.

   Zachée croyait avoir pris l’initiative, il croyait tout avoir en main, avoir trouvé un lieu confortable, un observatoire douillet… pour voir, scruter, analyser… et se faire sa propre idée de Jésus qui passait. Mais ne voilà-t-il pas que c’est plutôt Jésus qui le voit, c’est la parole elle-même qui vient à lui, la voix de Dieu qui l’interpelle, et qui l’invite à descendre.

   Jérémie : avant même d’être formé dans le sein de ta mère, moi, le Seigneur Dieu, je t’ai connu (Jr 1, 5); je suis à la racine de ton être, c’est moi qui te donne d’être; et pour moi, même la ténèbre n’est point ténèbre (Ps 138, 12). Nathanaël : avant même que Philippe ne t’appelle, moi, le fils de l’homme, je t’ai vu sous le figuier (Jn 1, 48)…

Jésus invite Zachée à descendre de son piédestal.

   Jésus prend Zachée comme par la main, et l’invite à faire mieux, c’est-à-dire plus simplement : descendre de son piédestal, sortir de sa cachette et son isolement, non pour se retrouver submergé par la foule tumultueuse et bruyante, mais pour renouer avec une certaine petitesse qui est aussi une certaine grandeur : l’humilité, et ainsi pouvoir contempler dans le silence de la chair la Parole qui a demeuré parmi nous.

   C’est pour être avec nous et demeurer parmi nous que le Verbe s’est fait chair. C’est en se faisant l’un de nous que Dieu rencontre chacun de nous personnellement, individuellement. Et quand nous nous ouvrons à cette bonne nouvelle, quand nous lui ouvrons la porte de nos cœurs, de nos vies, c’est la joie (kairos) de la rencontre, la conversion du cœur et des actes. C’est le salut (soteria) qui vient à nous et qui entre dans nos vies.

Zachée descend de sa superbe, il est redevenu homme parmi les hommes, fils d’Adam, fils de Dieu. Zachée a réintégré le cortège des pécheurs pardonnés, celui des saints, des sauvés. Désormais ses compatriotes ne sont plus pour lui des étrangers à exploiter, mais des frères à aimer, des frères pour qui intercéder, des frères avec qui partager.

Miracle de la rencontre. Miracle de la présence de Dieu dans nos vies. Grâce soit rendue à Dieu auteur de tels retournements, source de telles merveilles! Amen.

fr Jorel François. op.

Lien vers la décoration florale: Commémoration de tous les défunts.