Autel de la chapelle des Dominicains
Le silence du Samedi saint.
Le Samedi saint est ce linge étendu sur nous du deuil, du grand silence. Du vide et de l’anéantissement où nous foulons notre désespoir. Comme la grappe pressée de la promesse d’où sortira la vie au cours de la nuit pascale.
Ce temps pris entre les deux rives. De l’office des ténèbres qui jouxte la mort et de la joie baptismale de la vigile pascale qui jouxte la Résurrection. Nous marchons dans cette obscurité lumineuse de la foi qui n’a plus de signes, abandonnée à sa seule force qui est toute la grandeur de son union à Dieu.
Alors se fait jour en nous l’épreuve du silence et de la nuit. De la foi nécessaire à notre purification intérieure. Nous rappelant l’amertume du vinaigre et le bois purifiant de l’hysope offerts au Christ agonisant. Comme les prémices de ce passage de l’homme en Dieu et de son abandon sans condition.
Au premier jour de la semaine, lorsque les femmes trouveront le tombeau ouvert, il y aura encore ce vacillement de la foi devant le vide que Dieu remplit entièrement . « Pourquoi cherchez-vous le Vivant parmi les morts ? » (Luc 24, 5). Et c’est alors, devant le tombeau délaissé, que l’énigme de la séparation annoncée le jeudi saint nous donnera de vivre l’abandon total à partir duquel nous renaîtrons dans l’illumination de notre pauvreté.
Saint Cyran écrivait au XVIIe siècle dans l’austère ardeur du jansénisme naissant : « Nous devons nous aussi nous retirer de cette vue sensible du corps de Jésus Christ et de celle du ciel et de l’attache qu’on y peut avoir » pour entrer dans la profonde unité de la foi. Alors ce dépérissement des sens, cet enfouissement dans la pure adhésion de l’âme nous dévoileront progressivement l’intelligibilité des signes. En nous tenant ainsi à la dernière place des humbles et des écoutants, nous entrerons dans le mystère inaltérable de l’union à Dieu.
Texte d’inspirations diverses.