8 septembre 2024 – 23e dimanche du T.O., année B
Is 35, 4-7a ; Ps 145 (146) ; Jc 2, 1-5 ; Mc 7, 31-37
Homélie du frère Hervé Ponsot
Frères et sœurs, le thème de la guérison d’un malade au moyen de la salive de Jésus ne se trouve qu’à trois reprises dans nos évangiles : ici au chapitre 7 de saint Marc, avec un sourd-bègue, plus loin au chapitre 8 avec un aveugle, et au chapitre 9 de saint Jean, avec la guérison de l’aveugle-né, un récit qui paraît très proche de celui proposé par Marc. Mais cette singularité salivaire, si je peux en parler de cette manière, n’est pas celle qui a retenu mon attention : d’ailleurs chacun peut en faire l’expérience, la salive avec son pH neutre, adoucit les irritations. Si donc Jésus ne nous surprend pas totalement en pratiquant une guérison à partir de salive, il est plus singulier qu’il le fasse dans le territoire de la Décapole, et qu’il ait besoin pour cela de se mettre à l’écart de la foule.
Certains commentateurs estiment que la Décapole, ligue de dix villes grecques situées à l’est du lac de Tibériade et sous influence romaine, est représentative du monde païen avec ses idoles et ses démons. C’est peut-être le cas avec l’histoire du possédé en Marc 5, dont les démons sont chassés dans des porcs. Mais nous ne trouvons rien de tel dans notre chapitre avec le sourd-bègue. Pas plus d’ailleurs au chapitre 8 de Marc ou 9 de Jean. En revanche, dans le deuxième récit de Marc, il est à nouveau question d’une mise à l’écart, cette fois-ci de la ville.
Il nous faut donc nous interroger sur la signification de cette mise à l’écart de la foule, qui semble cruciale pour deux guérisons de même type chez le même évangéliste. Une mise à l’écart alors que cette foule semble être acquise à Jésus si l’on en croit les louanges qui lui sont adressées à la fin de notre passage évangélique. Il semble donc que la surdité, les difficultés de langage ou la cécité seraient dues, au moins en partie, à l’environnement immédiat. De sorte que prendre de la distance faciliterait le contact avec Jésus et favoriserait sa réintégration au milieu du peuple.
Chers amis, à moins que vous puissiez m’en proposer une autre plus convaincante, je vais retenir cette interprétation toute spirituelle. Laquelle confirme l’idée, voire même la conviction, que rien ne vaut une retraite sous quelque forme que ce soit, loin de son smartphone ou de tout autre instrument mondain de communication, pour rencontrer Jésus en vérité. Merci à tous ces lieux qui proposent toujours de telles retraites dans le silence et la prière.
Frères et sœurs, Jésus avait adressé cette invitation à ses disciples : « venez vous-mêmes à l’écart » (Marc 6,31-32). Comme il le faisait lui-même pour rencontrer son Père. Il nous adresse la même demande aujourd’hui parce que c’est ainsi que, selon la prophétie d’Isaïe, « se dessilleront nos yeux et s’ouvriront nos oreilles » à sa parole et à son action. Il est donc des écarts salutaires, grâce auxquels nous serons prêts à accueillir et annoncer le salut du monde en Jésus.