Connaître le Père… de Fr Matthieu Gauthier .

Connaître Dieu.

Mt 11, 25-30

 » Personne ne connait le Père, sinon le Fils,

et celui à qui le Fils veut le révéler. »

Homélie dominicale de Fr Matthieu Gauthier: Connaître le Père …

Version phonique:

Version écrite:

Connaître le Père…

            On dirait une morceau de l’évangile de saint Jean perdu dans celui de saint Matthieu. D’habitude, dans celui-ci, Jésus parle de son Père dans les termes du Royaume des cieux, et de lui comme le Fils de l’Homme. On trouve facilement chez saint Jean dans la bouche de Jésus les mots de Père, de Fils, et de connaissance de l’un et de l’autre, de l’un par l’autre. Alors, est-ce saint Matthieu (et saint Luc dans la passage parallèle) qui a synthétisé les paroles de Jésus que saint Jean a transmis. Ou bien est-ce saint Jean qui a déployé les paroles de Jésus transmises par les synoptiques ? Je laisserai un exégète patenté répondre à cette question. En définitive, l’essentiel pour nous ce soir, c’est que Jésus nous entrouvre une fenêtre sur lui en tant que Fils. Sur Dieu en tant que Père. Et sur la relation extraordinaire qui les unit, et qui nous est donnée à connaître.

            En premier lieu, à l’époque de l’écriture de l’évangile de saint Jean, et dans le siècle qui a suivi, on a beaucoup insisté sur la connaissance de Dieu. Tout d’abord, Jésus lui-même a déclaré que la vie éternelle, c’était de connaître le seul vrai Dieu et celui qu’il avait envoyé, Jésus-Christ. On en a parfois déduit que le salut était dans cette connaissance. Et on a développé tout un appareil philosophique parfois très subtil et complexe pour rendre compte de cette connaissance de Dieu. Avec comme conséquence : pour être sauvé, il faut des qualités intellectuelles supérieures. Eh bien cette conclusion est en complète contradiction avec ce que Jésus nous dit aujourd’hui. Aux sages et aux savants, le mystère demeure caché, alors qu’il est révélé aux tout-petits. Je vous propose trois exemples pour l’illustrer.

            D’abord sainte Jeanne d’Arc. Elle dit elle-même qu’elle n’a reçu de catéchèse que son Je crois en Dieu, son Notre Père et son Je vous salue Marie, qu’elle a appris sur les genoux de sa mère. Par les minutes de son procès, on a accès à toutes les peaux de bananes théologiques que ces Messieurs de l’université lui mettent sous les pieds pour la faire chuter. Et elle répond avec une sagesse ahurissante. Par exemple : « Jeanne, êtes-vous en état de grâce ? » Je ne sais vraiment pas ce que j’aurais répondu à sa place. Vous connaissez peut-être sa réponse : « Si j’y suis, qu’il m’y garde, si je n’y suis, qu’il m’y mette ! » Jeanne a tout compris au sujet de la grâce. C’est gratuit, c’est insensible, donc on ne sait pas bien si on l’a ou pas. Et c’est ce qui nous fait vivre absolument, ce qu’on ne peut que demander avec grande ferveur.

            Autre exemple, sainte Bernadette. Elle est envoyée par la dame à son curé pour demander de venir en procession à la grotte et d’y construite une chapelle. Tout d’abord, je ne sais pas si vous avez vu les photos de l’abbé Peyramale, mais c’est à faire peur. C’est une espèce d’ours qui ressemble à une porte de prison. Mais rien qu’à la photo, on imagine la voix avec laquelle il lui répond. « Tu ne vas tout de même pas me faire croire ça ! ». Et elle répond : « Elle ne m’a pas dit de vous le faire croire, elle m’a dit de vous le dire. »  Bernadette a tout compris du témoignage de la foi et de l’évangélisation. Il ne s’agit pas de faire croire quoi que ce soit, ni de montrer qu’on a raison. Il s’agit de dire le plus fidèlement possible ce que Jésus a dit ou fait !

            Enfin, troisième exemple, qui n’est pas une sainte, ou pas encore : Marjorie. Vous ne la connaissez pas, et moi non plus. C’est son curé qui m’a raconté cette histoire qui date d’une vingtaine d’années. Marjorie avait dix ans et coloriait une feuille sur la sainte Famille, avec Jésus et son petit rabot, imitant Joseph avec son gros rabot, et Marie qui devait faire quelque chose d’autre à côté. La légende de ce dessin était : « Ils font tout bien. » Eh bien Marjorie a protesté : « Ils ne peuvent pas faire tout bien pareil. En effet, le plus remarquable est que devant les explications du curé sur la sainteté, elle répliqua . « Oui, mais pour Joseph et Marie, c’est donné, alors que pour Jésus, il l’a en lui-même ! » Plus tard, le curé, en rencontrant les parents, les a félicités de la bonne formation spirituelle de leur fille. Ils ont répondu : « Oh, vous savez, nous, on n’y croit pas vraiment. Mais elle veut absolument aller en catéchèse, alors, on la laisse faire… »

            En fait, voici des petits qui comprennent des choses que nous adultes ne comprenons que difficilement et qui sont tellement profondes.

Fr Matthieu Gauthier op.

Lien vers la liturgie florale de l’été: Douceur et humilité.