La rencontre de deux assoiffés

3 mars 2024 – 3e dimanche de Carême
Lectures de l’année A:
Ex 17,3-7 ; Ps 94 (95) ; Rm 5,1-2.5-8 ; Jn 4,5-42
Homélie du frère Silvère Ametonou

Les lectures de l’année A pour les 3e, 4e et 5e dimanches du Carême sont spécialement adaptées au cheminement vers le baptême. Comme le propose la liturgie, nous avons pris ces lectures et non pas celles de l’année B.



Chers frères et sœurs,

Le récit de la rencontre de Jésus avec la Samaritaine que nous venons d’écouter est d’une densité inouïe qu’on ne saurait épuiser. Mais ce soir, mon attention se porte juste sur la soif de Jésus et celle de la Samaritaine. Jésus rencontre une femme de Samarie qui se pose beaucoup de questions sur sa vie, sa relation avec Dieu et avec le prochain. Elle est angoissée par des doutes et sent le poids de ses péchés. L’heure à laquelle elle vient au puits ne relève certainement pas du hasard. C’est l’heure où il est rare de rencontrer des gens. Cette femme semble ne pas être en paix avec elle-même. Cette situation de désharmonie intérieure pourrait s’aggraver au contact des gens. Elle n’est pas à l’aise avec son passé, tellement il est lourd. Mais elle n’est peut-être pas à l’aise non plus avec son présent. Elle s’isole pour avoir une certaine paix. Elle évite les rencontres.

C’est dans cette situation de misère que Jésus l’a rencontrée. Jésus compatit avec elle. Il a soif de la voir retrouver la paix et la joie. Il a soif de la voir être restaurée dans l’unité de son être, de la voir guérie. Bref, Jésus a soif de la voir sauvée. Il s’empresse pour son salut. Il n’a ni faim, ni soif, si ce n’est du salut de cette femme. Il l’exprime sans détour à ces disciples : « Ma nourriture, c’est de faire la volonté de celui qui m’a envoyé et d’accomplir son œuvre ». La volonté et l’œuvre du Père, c’est que tous et chacun aient la vie et qu’ils l’aient en abondance.

Cette femme a aussi soif. Elle veut boire l’eau vive qui étanchera pour toujours sa soif. Mais elle n’a pas la pleine conscience de la profondeur de ce qui constitue sa soif. Jésus l’a amenée progressivement à entrer en elle-même pour mettre le doigt sur ce qui fait sa misère. Jésus la rejoint dans sa fragilité, dans sa misère, afin de l’ouvrir à la grâce. « Va, appelle ton mari et reviens », lui dit Jésus. « Je n’ai pas de mari », a-t-elle répondu. Et Jésus de répliquer : « Tu as raison de dire que tu n’as pas de mari, car tu en as eu cinq, et celui que tu as maintenant n’est pas ton mari : là, tu dis vrai ».

Avec cette révélation sur sa vie privée, la Samaritaine reconnait en Jésus un prophète. Mais à mesure que la conversation évolue, elle va plus loin dans la découverte de celui qui lui propose l’eau vive qui jaillit en vie éternelle. Elle a l’intuition que Jésus est le Messie, parce que selon les prophètes, c’est le Messie qui fera connaître toutes choses quand il viendra. Jésus n’a pas hésité a lui confirmer que c’est bien lui le Messie.

Cette femme a trouvé la guérison dans sa rencontre avec Jésus, son ouverture à son message et son adhésion à sa personne. Sa vie a totalement changé. Elle a ouvert sa misère au Christ, et le Christ l’a guérie. Elle a retrouvé l’harmonie de son être, la paix avec Dieu et avec ses frères et sœurs en humanité. Elle ne peut plus s’isoler, elle n’a plus honte d’elle-même. Comme la rencontre avec le Christ l’a transformée, elle va aussi à la rencontre de ses frères et sœurs, non seulement pour leur partager ce que Jésus a fait pour elle, mais pour qu’eux aussi rencontrent le Christ pour faire leur expérience avec lui. Ils l’ont fait et ils ont aussi manifesté leur entière satisfaction.

Frères et sœurs, cette expérience de rencontre, d’ouverture, de découverte et de connaissance progressive du Christ, d’adhésion à son message et à sa personne est le cheminement qui est proposé aux catéchumènes qui se préparent au baptême, mais à nous aussi qui allons renouveler notre baptême dans la nuit de Pâques. Ne pas résister au Christ qui veut nous rencontrer dans toutes les misères de notre vie est une manière d’adorer Dieu en esprit et en vérité. Osons donc ouvrir nos cœurs et nos misères au Christ qui vient à nous pour nous transformer et nous donner l’eau vive qui jaillit en vie éternelle. Que l’Eucharistie de ce soir nous en donne la grâce, amen.

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