La violence du véritable amour

Vendredi 13 novembre 2020
Férie de la 32è semaine du Temps Ordinaire
2 Jn 1…9 ; Ps 118 ; Lc 17,26-37
Homélie du frère Hervé Ponsot

Mes frères, combien de fois avons-nous entendu l’exhortation à « nous aimer les uns les autres » ? Dix, cent, mille ? D’ailleurs, l’auteur de la deuxième lettre de saint Jean le reconnaît lui-même : « Ce que je t’écris là n’est pas un commandement nouveau, nous l’avions depuis le commencement ». Alors, pourquoi y revenir une fois encore ?

La réponse est simple : parce que nous ne le mettons pas assez en pratique. Nombreux sont ceux qui y manquent, je pense aux auteurs d’attentats pour prendre un exemple trivial, mais restons-en à ce que nous faisons ou ne faisons pas nous-mêmes. Sur les réseaux sociaux, où je suis souvent pour tenter d’y apporter réflexion et sérénité, les propos violents, haineux, se ramassent à la pelle, et cela vient de tous les bords sans exception. Allez voir ce qui se dit ou s’écrit sur Joe Biden ou Donald Trump, et pas seulement chez nos amis américains, mais aussi chez nous, entre chrétiens de France. Sur ce sujet ou sur d’autres d’ailleurs.

Il est vrai que le Seigneur Jésus ne nous demande pas d’être des bisounours : l’évangile ne rappelait-il pas récemment, que Jésus a renversé les tables des changeurs défigurant le temple, et qu’il l’aurait fait d’après saint Jean en utilisant un fouet fait de cordes ? Quant à ses propos aujourd’hui sur la venue du Fils de l’homme, sur le fait que telle personne sera prise, l’autre laissée, on peut en concevoir un vrai trouble !

Pourtant, en toute vérité, la violence de Jésus ne me paraît pas comparable à celle que je vois s’exprimer en de multiples lieux. Pour deux raisons. La première est que, telle que la rapportent les évangélistes, elle est plutôt de l’ordre de « gestes prophétiques », autrement dit de coups d’éclat ou d’interpellations destinés à marquer les esprits : ils sont spectaculaires, mais ne font aucun mal. La deuxième raison est que je suis convaincu que l’orientation donnée par Jésus à son apparente violence est toute différente : notre violence à nous sert notre satisfaction personnelle, elle vise à nous conforter dans nos positions ou à nous accrocher à nos biens ; à l’inverse, la violence toute relative de Jésus sert le bien de tous, elle cherche à mobiliser les consciences pour ouvrir ou rappeler la voie du renoncement et de l’amour.

Cette voie de l’amour passe elle aussi par une violence, subie, celle de la croix. Ne serait-ce pas pour cette raison que Jésus affirme, chez Matthieu comme chez Luc, que « le royaume des cieux est forcé, et que seuls les violents s’en emparent ? » Oui, la violence chrétienne ne peut être autre que celle de l’amour donné jusqu’à la croix : il s’agit donc bien d’un commandement nouveau.

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