L’appel des apôtres – Nicolas Poussin / Musé d’Irkoutsk.
Mc 1, 14-20
« Je vous ferai devenir pêcheurs d’hommes. »
Homélie de Fr Arnaud Blunat: Pêcheurs d’hommes..
Version phonique:
Version écrite:
Pêcheurs d’hommes.
« Aussitôt, laissant leurs filets ils le suivirent ». L’évangile nous présente ainsi les débuts de la mission de Jésus. C’est sans hésiter que les apôtres ont ainsi répondu à son appel. André et Pierre, puis Jacques et Jean, ou plus tard Matthieu et les autres, tous ont tout quitté pour suivre le Christ. Toute l’histoire de l’Église est faite de ces conversions radicales, fulgurantes. Paul, Antoine, Charles de Foucauld, Péguy et tant d’autres. Pour eux l’appel à la conversion a été irrésistible. Même Jonas a fini par accepter de répondre à l’appel de Dieu et sa prédication a obtenu des résultats inattendus : « aussitôt, les gens de Ninive crurent en Dieu ».
Devenir des pêcheurs d’hommes : cette promesse a de quoi surprendre. Comment des hommes si expérimentés, des pêcheurs professionnels, des hommes courageux et réalistes, si habiles à prendre du poisson. Comment pourraient-ils se laisser prendre par un tel discours ?
Mais surtout, comment ont-ils pu tout quitter pour suivre cet homme qu’ils connaissaient à peine ? Le récit se livre dans toute sa simplicité. Ils n’ont posé aucune question, ni fait la moindre objection. Ces hommes possédaient des biens, avaient une certaine surface sociale, et pourtant, ils n’ont pas hésité à suivre Jésus et à remettre leur vie entre ses mains. Ils lui ont fait totalement confiance, ils se sont laissé toucher par sa parole.
Ces hommes sont semblables à tant d’autres et pourtant quelque chose les distingue. Ils sont vraisemblablement habités par une soif intérieure qui se révèle à travers cet appel. Mais surtout ils sont choisis pour une mission au cœur de ce monde. Or les bords de la mer de Galilée où ils vivent et travaillent symbolisent ce monde, cette humanité où Dieu les envoie. La Galilée est en effet une région de passage, où cohabitent des populations d’origine et de conditions diverses. Elle est un carrefour de nations, une terre de brassage culturel et social. Jésus invite donc ces hommes à quitter le lieu qu’ils connaissent, le domaine qu’ils maîtrisent, pour aller à la rencontre d’un monde qu’ils ne connaissent pas encore. Désormais ce ne sont pas des poissons qu’ils prendront mais des hommes. Leur activité ne sera plus tournée sur leur propre sort, leur survie, sur eux-mêmes, mais sur le sort des autres. Jésus leur ouvre une perspective sans limite en leur proposant de travailler pour le règne de Dieu.
Ils vont découvrir que la mission de Jésus c’est de rassembler les hommes de toutes langues, peuples et nations, pour qu’ils reconnaissent en lui leur Seigneur et Sauveur.
Frères et sœurs, aujourd’hui cet appel s’adresse à nous. L’urgence de la conversion autant que de la mission n’est pas un vain mot. Être chrétien, ce n’est pas se satisfaire de ce monde tel qu’il est, tel qu’il se présente. Ce monde avec ses perspectives de progrès infinis peut nous fasciner ou nous affoler. Il ne faut pourtant ni l’idolâtrer ni le rejeter. Avec l’intelligence que Dieu lui a donnée, l’homme peut transformer ce monde pour qu’il permette à chaque homme de vivre de manière plus digne et plus juste.
Ce qui reste et restera toujours à changer, à réformer, c’est son être intérieur, son cœur. Car ce qui fait que nous sommes des hommes, c’est notre capacité à faire entrer les autres dans notre cœur. On disait de Saint Dominique qu’il savoir faire entrer tout homme dans son cœur, dans le vaste sein de sa charité. C’est à cela que l’on peut mesurer notre degré d’humanité. Et la source de cette charité est en Dieu, le Tout Autre qui nous aime, par qui nous existons et nous aimons. Ce qui fait notre vraie dignité, c’est de reconnaître dans la personne de Jésus le modèle de notre humanité, notre maître autant que notre frère, parce qu’il a tout donné par amour.
C’est bien vers lui que tout doit être ramené. Car il est venu pour rassembler tous les hommes pour les conduire au Père, dans l’unité de l’amour trinitaire. Chacun de nous est donc invité, et même appelé, de par son baptême, à utiliser ses dons, ses talents, son énergie, tout son être, pour travailler à ce règne de Dieu. Oui, toute notre vie, toutes nos activités, trouvent leur signification et leur accomplissement quand elles sont orientées vers cet horizon du royaume. Nos pensées, nos paroles et nos actes sont destinées à être entièrement tournées vers le Christ.
L’appel des disciples s’étend aujourd’hui à tout homme.
Nos engagements, aussi divers soient-ils, resteront vains tant qu’ils ne seront pas référés à Dieu. Régénérés dans son amour, alimentés par sa Parole, vivifiés par la prière, par ce cœur à cœur vital. Ce n’est pas notre œuvre mais bien celle de Dieu. L’appel des disciples s’étend aujourd’hui à tout homme, quel qu’il soit, car tout homme est habité par une soif de vie et de salut. Et à nous particulièrement, soyons à l’écoute de cet appel, à ce défi quotidien. La mission de ramener les hommes et les femmes de ce temps vers le Christ vous est confiée à vous aussi. On ne peut certes pas tout faire, mais chacun pourra percevoir un appel et recevoir la force d’y répondre généreusement.
Alors, à la manière des apôtres, laissons-nous conduire par le Christ pour devenir les « pêcheurs d’hommes » dont Dieu a besoin aujourd’hui.
Fr Arnaud Blunat op.
Lien avec la décoration florale du jour: Appelés… « Venez à ma suite. »