Prédication du frère Arnaud Blunat pour le samedi de Pâques (sur Ac 4,13-21 et Mc 16,9-15)
L’évangile de Marc insiste particulièrement sur un détail : l’incrédulité des disciples. Ce ne sont pas seulement quelques doutes, quelques réserves. Le texte dit bien : ils refusèrent de croire. Jésus lui-même leur reproche leur manque de foi, la dureté de leur cœur.
Si Marc prend soin de noter cela – qui, au fond, n’est pas un détail – c’est bien parce qu’il s’agit d’un des ressorts essentiels de ces récits de la résurrection. La résurrection de Jésus ne pouvait pas être une évidence. Il fallait inévitablement du temps pour que les disciples réalisent l’impensable.
Si Marc insiste tant, alors qu’il aurait pu, a posteriori corriger son texte, c’est qu’à son époque, comme pour nous aujourd’hui, le message de foi ne peut nullement s’imposer de manière évidente. Si pour certains, c’est un fait désormais acquis, pour tant d’hommes et de femmes, l’adhésion pure et simple à la foi reste difficile, voire impossible.
2000 ans plus tard, le cœur des hommes résiste. Et peut-être même encore davantage, au regard des événements de notre monde, le dévoilement de tant de scandales dans l’Eglise et en dehors d’elle, les divisions, les dissensions, les oppositions, tout cela rend le message irrecevable pour bon nombre de personnes.
Et pourtant, Jésus n’a pas renoncé à envoyer ses disciples en mission : « allez dans le monde entier. Proclamez l’évangile à toute la création ». De même que Jésus a envoyé Pierre, qui l’avait renié, Pierre qu’il confirme dans sa mission de conduire l’Eglise, de même il envoie ceux-là même qu’il n’a pas encore réussi à convaincre. Comme le semeur qui ne sait pas ce qu’il récoltera mais qui sème néanmoins à tout vent, Jésus, mû par la force de l’Esprit, fait de tout homme son témoin, il fait de chacun de nous son messager, son envoyé.
Bien sûr, il a fallu le don de l’Esprit Saint à la Pentecôte pour que tout cela se réalise, mais il a aussi fallu cette incroyable audace de Jésus au soir de la Résurrection.
Rien que cela pourrait suffire à nous faire croire. Comment peut-il me faire confiance, à moi qui suit si inconstant, si hésitant, si timoré, comment peut-il me choisir comme disciple et m’envoyer comme apôtre ? C’est justement parce qu’il me fait confiance, parce qu’il m’aime malgré mes faiblesses et mes limites, qu’il compte sur moi, comme sur chacun de nous, pour dire au monde ce que le monde a besoin d’entendre : Jésus est vraiment ressuscité, il est vraiment le Sauveur de tous les hommes. Son amour inconditionnel est le chemin par lequel les hommes peuvent sortir de leurs impasses, de leurs prisons, de leurs enfers.
En ce temps de crise mondiale, il est plus que jamais urgent, non seulement d’entendre ce message, mais aussi de le dire, de le redire à tous. Car Dieu seul peut changer les cœurs et la face de la terre. Par la résurrection de Jésus, il oriente le cœur de l’homme vers sa destinée finale et lui donne les moyens de construire un monde fondé sur l’Amour.