L’Amour, la Loi nouvelle… de Fr Arnaud Blunat.

Traité de l’Amour de Dieu – Saint François de Sales.

L'Amour, la Loi nouvelle

Mt 5, 17-37

 » Que votre parole soit ‘oui’ si c’est oui, ‘non’ si c’est non « .

Homélie dominicale de Fr Arnaud Blunat :

Version phonique:

Version écrite:

L’Amour, la Loi nouvelle…
           Avez-vous déjà demandé autour de vous qui était Jésus ? Vous connaissez la question que Jésus a posée à ses disciples : Pour vous, qui suis-je ? Déjà à son époque, on le prenait pour un dangereux révolutionnaire ou un doux rêveur. Dès son premier discours, certains pensent qu’il veut tout changer, abolir la Loi et les Prophètes. A ceux qui croyaient que rien ne pouvait surpasser la Loi de Moïse, il oppose une réflexion morale plus exigeante. Mais son exigence n’est pas dans la multiplication des prescriptions, dans une casuistique tatillonne, ou bien dans des arrangements qui pourraient convenir à tel ou tel. La véritable exigence est de l’ordre de la charité, elle relève de l’amour. Il s’agit d’aller au-delà des convenances sociales, des comportements respectables, des mesures raisonnables. Jésus nous indique une feuille de route avec des pistes claires, nettes et précises. Il nous appelle à une conversion radicale.
          Trois domaines nous sont ici présentés, relatifs à trois commandements : l’interdit du meurtre, l’interdit de l’adultère et le respect absolu des serments. Trois commandements qui sont aujourd’hui constamment bafoués partout dans notre monde, dans notre société. Leurs applications ou leurs contrefaçons alimentent les rubriques de nos serveurs, les colonnes de nos journaux ou inondent nos comptes facebook ou twitter.
          Commençons par le meurtre. Il semble juste et raisonnable de passer en jugement celui qui commet un meurtre. Mais qu’en est-il de ce déferlement médiatique auquel nous assistons, dont nous sommes saturés, au point de ne plus pouvoir savoir la vérité, et séparer le vrai du faux ? Le meurtre qu’il soit politique, médiatique, virtuel, n’en est pas moins réel, à moins d’estimer que cela fasse partie de ce besoin cathartique qui est le propre des sociétés en crise. Le défoulement permanent auquel tout un chacun s’adonne sur les réseaux sociaux serait les nouveaux jeux du cirque. On sait bien que les chrétiens ont fini eux-mêmes par remplacer les fauves qui finissaient par ne plus amuser personne.
Jésus est très clair avec ses auditeurs : la seule porte de sortie, la seule issue, elle est dans l’arrêt de la surenchère et la conversion. Ne viens pas te présenter devant le Seigneur avec des envies de meurtre, de vengeance, de règlement de compte, avec qui que ce soit, tel homme politique, ta belle mère, ta voisine ou ton frère. Une seule solution : sortir de la colère, retrouver la paix intérieure, te réconcilier sans délai. Dans ce domaine, on oublie trop souvent la puissance du sacrement du pardon. La porte du confessionnal est grande ouverte.
          Sur le sujet de l’adultère, on pourrait penser que Jésus manipule volontiers l’hyperbole, ou bien qu’il est complètement en marbre. Ni l’un ni l’autre. Nul ne dira qu’on peut encourager l’adultère. Partir avec la femme de son meilleur ami ou avec le mari de sa collègue de travail, c’est moche. Inciter à le faire, ne rien dire, ne pas dissuader, c’est partager la responsabilité, cela ne vaut guère mieux. Il ne s’agit ni de juger ni de condamner, mais de rappeler que face à toute situation de faiblesse qui risque de nous fait tomber, face à toute ambiguïté que l’on cultive ou justifie, plus ou moins consciemment, il faut savoir réagir, fermement et sans retard. Jésus utilise une expression tout-à-fait nouvelle pour son temps : « commettre l’adultère dans son cœur » : « celui qui regarde une femme avec convoitise a déjà commis l’adultère avec elle dans son cœur ». Ce faisant, il appelle à une réaction ferme, immédiate, radicale, il incite à la purification du désir. Mais essayons de creuser : Il ne suffit pas de ne pas avoir de mauvaises pensées, ou même de tentations, il faut pouvoir identifier ce qui peut en être la cause, la source, puis mobiliser notre volonté pour changer de direction. Mais le plus difficile, c’est de décider de changer. La conversion, c’est justement de dire : non ! Cette femme n’est pas pour moi. Cet homme est déjà pris. Ce film que je passe et repasse dans mon imaginaire est un poison, un venin mortel. Le remède, c’est l’antidote que fournit tant la raison que la foi, la réflexion et la prière. Je prends conscience que non seulement je perds mon temps, mon énergie, mon argent, mais aussi je ruine mon cœur et mon âme. Là encore, une seule solution : la conversion passe par un retour à Dieu. La confession libère, le pardon restaure, la joie efface la tristesse du péché. Là encore, la porte du confessionnal est ouverte.
          Enfin, pour ce qui est des serments, des promesses, on voit bien où cela conduit. Les grands discours, les belles déclarations sont de saison. Mais il faut savoir discerner, ne pas tomber dans les deux écueils de l’excès d’enthousiasme ou du dénigrement systématique. Promettre, c’est engager sa propre responsabilité, c’est parler à la première personne. Je m’engage personnellement dans mes prises de position, je m’engage à dire oui, ou non, en sachant ce que je dis, pourquoi je le dis, et ce que cela pourra avoir comme conséquence. Quand deux fiancés s’engagent dans le mariage, ils doivent comprendre qu’ils ne mettent pas leur confiance en eux-mêmes mais bien en Dieu. Jusqu’au bout, ils auront besoin de se tourner vers Lui, pour lui remettre leur vie entière, leurs décisions, leurs choix, de sorte qu’ils pourront recevoir la lumière pour bien les appréhender et la force pour bien les accomplir.
          Donner sa parole aujourd’hui apparait comme relatif au contexte du moment, aux personnes en qui on ne peut avoir qu’une confiance limitée. C’est bien là une des grandes fragilités de notre temps, et qui est aussi la marque de l’esprit de division et de confusion qui souffle sur notre monde. Ce qui est ni oui ni non, ce qui est tiède vient du mauvais. Face à une certaine illusion de sagesse, de prudence, il faut justement se tourner vers Dieu. Car on peut faire preuve de lâcheté, par faiblesse, par peur, mais surtout par oubli de Dieu, parce que Dieu n’est plus à l’horizon, il n’est plus sur l’écran de contrôle. Le monde ne cesse de nous dire que Dieu n’est qu’une option personnelle, il relève de la vie privée. Certes, mais n’est-il pas pour nous celui qui nous indiquera toujours la voie du bien et nous gardera de tomber dans le jeu du malin ? Jésus est expert pour démonter les justifications à bon marché et les arguments trompeurs.
          C’est en lui que nous trouvons notre force, notre confiance, notre secours. Il est le Chemin, la Vérité et la Vie. C’est Lui la Loi nouvelle, celle qui nous invite à aimer, Dieu et notre prochain comme nous-mêmes. C’est Lui qui opère en nous la vraie révolution. Car en Lui tout est accompli !

Frère Arnaud Blunat op .

Lien vers la liturgie florale du jour: Perfectionnement