Le Sauveur nous est donné !

Nuit de Noël 2020
Is 9,1-6 ; Ps 95 ; Tt 2,11-14 ; Lc 2,1-14
Homélie du frère Damien Duprat

« Un enfant nous est né, un fils nous a été donné », exultait le prophète Isaïe. En cette nuit, nous nous réjouissons de la venue au monde de cet enfant qui est notre sauveur ; c’est le sens de son nom : Jésus signifie « le Seigneur sauve ».
Ainsi donc, celui qui nous sauve nous est donné, et j’aimerais réfléchir un peu avec vous à ce que cela veut dire que celui qui nous sauve nous est donné dans l’enfant de la crèche.
D’abord, que signifie sauver, pour notre foi ? Autrement dit, en quoi consiste le salut que Dieu nous donne ?
Probablement, pour la plupart d’entre nous, cette question ne fait pas grande difficulté ; le thème du salut est omniprésent dans la liturgie de l’Église ; cependant il est souvent avantageux de considérer de nouveau les vérités fondamentales de notre foi, ne serait-ce que pour nous préparer à mieux en rendre compte à d’autres personnes moins familières de ces vérités.
D’une façon générale, être sauvé signifie être délivré d’une mauvaise situation dans laquelle on risque de tomber, ou dans laquelle on se trouve déjà. Le peuple d’Israël, au cours de son histoire, a souvent fait l’expérience d’être sauvé par Dieu : sauvé de la servitude d’Égypte, sauvé de l’exil à Babylone, sauvé de la main de ses ennemis…
Mais de quoi Jésus nous sauve-t-il ? L’ange qui a parlé en songe à Joseph avant la naissance de Jésus le lui a dit : « c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés ».
St Paul aussi le rappelle à son disciple Tite comme nous venons de l’entendre : « il s’est donné pour nous afin de nous racheter de toutes nos fautes » ; nous racheter, nous sauver, c’est la même chose.
Pourquoi est-ce si important pour nous d’être sauvés de nos fautes ? Comme le dira Jésus : « tout homme qui commet le péché est esclave du péché » ; donc, en nous sauvant de nos péchés, il fait de nous des hommes et des femmes libres, libres pour accomplir de bonnes choses, il fait de nous « un peuple ardent à faire le bien », comme saint Paul vient aussi de nous le dire.
Il faut ajouter que le péché, c’est la séparation d’avec Dieu ; or Dieu est la Vie et la source de toute vie ; donc celui qui demeure sous l’emprise du péché se condamne lui-même à l’esclavage de la mort éternelle.
Par conséquent, en nous sauvant du péché, le Christ nous sauve aussi de la mort. C’est donc de notre vie qu’il s’agit ; je veux dire, de notre vie éternelle. Tel est le salut que Dieu nous donne et qui porte aussi le nom de Rédemption. Nous le croyons, et cette nuit nous fêtons l’avènement de ce salut.
Voilà donc en quoi consiste le salut de Dieu. Mais je voudrais encore vous poser une seconde question : avons-nous pris toute la mesure de ce que cela signifie que ce salut nous est donné en Jésus-Christ ?
Sans doute non, et au terme de cette homélie, ce ne sera pas encore le cas, puisque le mystère de Dieu, même s’il nous a été révélé, dépassera toujours nos capacité des compréhension. Mais je voudrais quand même réfléchir encore un peu avec vous sur ce don du salut.
Un don est un acte libre ; de la part de Dieu, le fait de nous donner un Sauveur est aussi un acte libre, un acte libre de Dieu.
Acceptons-nous vraiment qu’une affaire aussi importante que notre vie ne dépende pas d’abord de nous, mais d’un acte libre de Dieu ? Acceptons-nous que notre salut éternel nous soit donné comme une grâce que nous n’avons pas méritée ?
Pour le savoir, il me semble qu’un bon moyen est de voir si nous acceptons aussi de recevoir ce salut de la main des autres. Bien sûr, le Christ est le seul sauveur ; il s’est lui-même chargé de nous sauver, si bien que le poids du salut du monde repose sur ses épaules, non pas sur les nôtres, ni individuellement ni même collectivement ; et pourtant, nos actes ne sont pas sans conséquence sur le déploiement de l’œuvre de Dieu, parce qu’il en a voulu ainsi. Par exemple, qu’en serait-il de nous si personne ne nous avait parlé de Jésus ? transmis l’Évangile ? Dieu nous a remis entre les mains les uns des autres ; c’est spécialement vrai en famille ou en communauté religieuse. Le créateur donne à chacun de nous un certain pouvoir pour témoigner de son amour et de son salut à ceux qui nous entourent ; c’est pourquoi le salut de Dieu nous parvient concrètement la plupart du temps par l’intermédiaire d’autres personnes ; est-ce que je l’accueille avec joie ? est-ce que je me laisse aimer ?
« Vous avez reçu gratuitement, donnez gratuitement », dira le Christ (Mt 10,8) ; est-ce que je me soucie, à mon tour, de témoigner du salut de Dieu aux autres ? par exemple, est-ce que je cherche à saisir les occasions qui me sont données pour aimer gratuitement au nom de Dieu ? Est-ce que je cherche à faire non seulement ce que l’on peut légitimement attendre de moi, mais même un peu plus que cela ? Si je néglige d’être un témoin du salut de Dieu, la vie d’autres personnes pourra en être affectée, même si la miséricorde de Dieu ne se laisse vaincre par aucun de nos manquements.
Que le Sauveur qui nous est donné en cette sainte nuit ouvre pour toujours nos mains pour que nous le recevions et que nous le donnions.

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