Merci, du fond du cœur !

9 octobre 2022 – 28è dimanche du T.O., année C
2 R 5,14-17 ; Ps 97 (98) ; 2 Tm 2,8-13 ; Lc 17,11-19
Homélie du frère Benoît-Marie Simon



Fresque (détail) de la chapelle de la Visitation à Paray-le-Monial (Saône-et-Loire) – XXè s.

Le passage de l’évangile que nous venons d’entendre n’est pas, loin de là, le seul récit de miracles accomplis par le Christ. Mais il a cette particularité de mettre plutôt l’accent sur la réaction de ceux qui ont été guéris lorsqu’ils s’en aperçoivent. Et on découvre alors, d’une part, qu’un sur dix seulement vient remercier le Christ et se prosterner à ses pieds ; et, d’autre part, qu’il s’agit d’un Samaritain.

Les deux points méritent réflexion.

Un sur dix, ce n’est vraiment pas beaucoup ! Ce n’est même pas la majorité d’entre eux et il s’en faut de beaucoup.

Pourtant, remercier, lorsqu’on reçoit gratuitement un bienfait, quoi de plus naturel ! Quoi de plus facile aussi ! Inversement, il faut être singulièrement endurci et enfermé en soi-même pour ne pas le faire. Comment ne pas évoquer à cette occasion les paroles du Christ à Sainte Marguerite Marie : « Voici ce cœur qui a tant aimé les hommes et n’a reçu en retour que mépris et indifférence ! »

Il est donc possible qu’un cœur humain soit si endurci que même un miracle gratuit ne le touche pas. Mais alors, qu’est-ce qui le touchera ? Il n’y a pas si longtemps nous avons lu le passage du mauvais riche et du pauvre Lazare et sa conclusion : « du moment qu’ils n’écoutent ni Moïse ni les prophètes, même si quelqu’un ressuscite d’entre les morts ils ne seront pas convaincus » (Lc 16,31).

Cet épisode est d’autant plus troublant que la lèpre exclut, de sorte qu’être délivré d’une telle horreur devrait susciter une gratitude débordante et spontanée !

Pire encore, ces neufs lépreux sont juifs, par conséquent, théoriquement, ils savent que le Messie doit venir. Or, ce miracle doit au moins les inciter à se demander si celui qui les a guéris ne serait pas le Messie en question !

Décidément, ils n’attendent pas vraiment le Sauveur promis par Dieu, du moins pas toute affaire cessante. La personne du Christ ne les intéresse pas, même s’ils l’appellent maître. Tout au plus sont-ils bien contents de profiter du fait qu’il peut améliorer leur condition, aussi le supplient-ils de les guérir, mais ils n’iront pas plus loin.

Faisons attention, frères et sœurs, à ne voir dans la foi qu’une invitation à soulager la misère du monde, en oubliant qu’elle nous met d’abord en contact avec celui qui est le Chemin, la Vérité et la Vie, parce qu’il est Dieu et qu’il a les paroles de la vie éternelle.

Heureusement, parmi ces dix lépreux, il y en a tout de même un qui retourne sur ses pas, glorifie Dieu et se prosterne au pieds de Jésus. Il a une particularité qui le distingue des autres, c’est un Samaritain ; autant dire qu’il ne fait pas partie du peuple élu, de ceux qui ont reçu les promesses du salut.

Pourquoi souligner ce point ? Tout simplement parce qu’il est la preuve concrète de cette vérité : on s’ouvre au salut apporté par le Christ dans la mesure où on en a soif au fond de son cœur, en vertu d’un choix libre, donc personnel. Tellement personnel qu’il peut nous demander d’aller à contre-courant, à l’exemple de ce Samaritain. Il peut même se faire que la satisfaction de croire accomplir ce qui est juste étouffe le désir en question.

Eh bien, c’est parce que, lui, il avait un tel désir, que ce Samaritain est retourné sur ses pas pour louer Dieu et s’entendre dire par le Christ : « va, ta foi t’a sauvé ».

Dans d’autres occasions, c’est avant d’accomplir le miracle que le Christ demande, à ceux qui l’implorent, s’ils ont la foi, comme si le miracle répondait à la foi. Ici, c’est la façon dont on réagit au miracle, qui manifeste la présence ou pas de la foi. Dans tous les cas, Dieu guérit les corps, pour que l’âme, dans la foi, s’ouvre au salut éternel.

Frères et sœurs, retenons la leçon : Dieu peut faire pour nous des choses extraordinaires, ou nous donner d’accomplir des choses extraordinaires, cela ne signifie pas nécessairement que nous avons la foi et, ce qui est le plus important, qu’en vertu de cette foi, nous serons sauvés.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*