Par-delà le tombeau et la mort

Prédication du frère Damien Duprat pour la messe de la nuit de Pâques (sur Mt 28,1-10)

 

Sortir… Normalement, si du moins nous sommes bien portants, pour sortir, il nous suffit de le décider et de franchir le seuil de notre logis : et voilà, c’est fait, c’est aussi simple que cela, nous sommes dehors !

Mais il y a des moments où ça devient vraiment toute une affaire !
Par exemple, maintenant, depuis des semaines, pour nous comme pour la majeure partie de nos frères humains, sortir est beaucoup plus compliqué que d’habitude.
Mais il y a d’autres situations où c’est encore plus compliqué. Par exemple, quand on est enfermé dans un tombeau, sortir, c’est toute une affaire !

C’est même impossible !
C’est impossible à cause d’une loi qui remonte à la nuit des temps et qui concerne tout le monde : la dure loi de la mort, qui interdit aux défunts de sortir vivants de leur tombeau !
Cette loi, personne n’a jamais été en mesure de l’abroger ; personne n’a jamais eu ce pouvoir. Personne ?

Ah attendez, certains disent que si ! En cette fête de Pâques, innombrables sont celles et ceux qui proclament que Jésus-Christ, mort sur la croix et déposé dans un tombeau, en est sorti vivant !
Mais qui ose dire une chose pareille ? Attention ! Nous ne voulons pas de fake news ! En français on peut dire infox : pas d’infox ! Alors prenons un petit moment pour vérifier si cela est vrai.

D’abord, qui a été le premier à annoncer cette nouvelle qui s’est ensuite répandue presque aussi vite qu’un virus sur toute la surface de la terre ?
Nous le savons, le premier à le dire est en fait une première : Marie-Madeleine, accompagnée de l’autre Marie selon l’Évangile que nous lisons cette nuit. Des femmes ! Voilà un premier élément de crédibilité ! Mais oui : si quelqu’un avait voulu inventer de toutes pièces le récit de la Résurrection, jamais il n’aurait confié à des femmes le rôle d’en être les premiers témoins, puisque dans le monde antique, leur témoignage n’avait pas de valeur ! On le voit bien au fait que les apôtres eux-mêmes ont mis du temps avant de croire à ce qu’elles disaient. Paradoxalement, ce point est un élément important qui nous pousse au contraire à croire que nos textes d’Evangile ne font que relater ce qui s’est réellement passé.

J’ai parlé des apôtres. S’ils avaient inventé cette histoire de Résurrection, pour laquelle d’ailleurs presque tous sont morts martyrs, est-ce que nous les verrions tenir un rôle aussi peu glorieux ? Sans même parler de la trahison de Judas, nous voyons Pierre renier son maître, et presque tous les autres s’enfuir. Franchement, ce n’est pas en se donnant un si mauvais rôle qu’on cherche à convaincre d’une histoire qu’on crée de toutes pièces. Là aussi, c’est paradoxalement une raison de croire ce qu’ils nous disent !
On pourrait encore en dire beaucoup à ce sujet, en évoquant par exemple la cohérence de l’Écriture sainte, la force du témoignage du Christ en paroles et en actes, le fait qu’il a lui-même annoncé plusieurs fois sa Passion et sa Résurrection, etc. Tout cela, ce sont autant d’éléments convergents qui nous disent que la foi en la Résurrection du Christ, c’est du solide !

Le Christ est ressuscité, il est vraiment ressuscité ! Mais je n’ai traité qu’un seul des deux versants de la question ; j’ai donné quelques raisons de croire en la Résurrection du Christ ; c’est déjà énorme ! Mais immédiatement nous pouvons nous demander, nous devons nous demander : en quoi cela nous concerne-t-il ? Que Jésus soit ressuscité, c’est une excellente nouvelle, mais nous ?Là il nous faut nous rappeler ce que saint Paul nous a dit dans la lecture de cette veillée pascale : « si nous avons été unis [au Christ] par une mort qui ressemble à la sienne, nous le serons aussi par une résurrection qui ressemblera à la sienne. » (Rm 6,5).

Toute la Révélation divine va dans ce sens. Déjà lorsque le peuple hébreu se trouvait devant la mer Rouge avec l’armée égyptienne à ses trousses, Dieu a montré qu’il voulait sauver son peuple tout entier. Jésus-Christ est ressuscité des morts, mais le but ultime de cet événement inouï est d’ouvrir à tout croyant les portes du Royaume. Le Fils de Dieu n’avait pas besoin de s’incarner pour lui-même, lui qui vit depuis toujours et pour toujours dans l’intimité de son Père et de l’Esprit. S’il a pris notre chair, c’est pour nous, parce que nous en avions besoin, non seulement pour mieux vivre mais pour vivre tout court.

Jésus-Christ a été le premier homme à remonter du séjour des morts en vivant d’une vie nouvelle, incorruptible ; mais il n’est pas le dernier ; il est au contraire le premier d’une multitude de frères. L’histoire nous offre déjà d’innombrables exemples de ces hommes et de ces femmes qui ont vécu dès cette terre de la vie du Christ. Chacune de leurs existences constitue d’ailleurs une raison supplémentaire de croire que le Christ est vivant aujourd’hui et qu’il a la puissance de vivre en nous pour notre plus grand bonheur.

Fr. Damien Duprat o.p.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*