Saint Joseph, maître de discernement.
Mt 13, 44-52
» Le royaume des Cieux est comparable à un trésor caché dans un champ… »
Homélie dominicale de Fr Hervé Ponsot:
Version phonique:
Version écrite:
Principe de discernement.
Frères et sœurs, permettez-moi de vous raconter une petite anecdote, que beaucoup de mes frères dominicains connaissent. Au moment de mon entrée dans l’Ordre des Prêcheurs, je me suis dit que je devais avancer léger. Me débarrasser de tous mes faux trésors pour ne plus m’attacher qu’au Seigneur Jésus. J’étais encore propriétaire d’une petite 2 CV. Du jour au lendemain, non sans une certaine fierté je l’avoue, je l’ai vendue. Mais voilà que quelques mois plus tard, un de mes frères de noviciat met en cause un tee-shirt dessiné que je portais. Et, je vous l’avoue, j’ai eu un mal fou à m’en défaire.
En réalité, j’avais bien un trésor, mais ce n’était pas celui que je pensais. Voilà pourquoi, me semble-t-il, la fin de notre évangile, qui semble si différente de son début en mettant en scène un tri qui s’opère après la pêche, joue un rôle essentiel. Elle nous invite au discernement dans l’évaluation de ce qui nous est le plus cher ! Et il y a toujours quelqu’un ou quelque chose qui nous est très cher, plus que tout !
Ce plus cher, on peut évidemment attendre d’un chrétien qu’il soit Jésus. Ce fut mon objectif à mes débuts dans la vie religieuse, et cela le reste aujourd’hui encore. Qui d’autre en effet mérite que l’on donne tout pour lui, lui qui a tout donné pour nous, et jusqu’à sa vie même ? Pour un juste, peut-être donnerions-nous notre vie, mais lui l’a donnée pour des pécheurs et des injustes… Oui, Jésus est notre vrai trésor mais encore nous faut-il nous orienter et le trouver, et, dans la deuxième lecture, saint Paul souligne qu’il s’agit là d’un chemin, d’un but à atteindre : pour reprendre l’anecdote que j’évoquais tout à l’heure, céder mon tee-shirt ne fut qu’une étape sur le chemin.
Comment donc aller plus loin ? La demande du roi Salomon dans la première lecture apporte une réponse claire. Salomon aurait pu demander à Dieu la richesse, le savoir, l’écrasement de ses ennemis, l’extension de son royaume, et… il choisit la sagesse et l’intelligence. Non pas donc ce qui était le plus évident, ou le plus immédiat, ou ce qui pouvait lui donner le plus de plaisir à court terme, mais ce qui serait le plus utile et profitable à long terme, pour lui et surtout pour le bien de son peuple. Oui, Salomon ne choisit pas en fonction de lui, mais du bien d’autrui.
Voilà un excellent principe de discernement pour tout être humain, qu’il soit chrétien ou non, et au regard duquel bien peu de nos trésors résistent : les tee-shirts, les voitures, les ordinateurs, les téléphones, les disques, les voyages somptueux, les choisissons-nous parce qu’ils sont utiles et profitables pour ceux qui nous entourent ou bien pour nous-mêmes ? Bien sûr qu’il y a de très bonnes choses dans tous ces biens, qui peuvent faciliter le service d’autrui, mais n’avez-vous pas trop souvent l’impression de faire des choix en fonction d’un usage égoïste et non pas du bien d’autrui ? Un tri régulier demande sûrement à être fait pour que tout ce que nous faisons, tout ce que nous choisissons soit tourné vers le bien du prochain.
Vouloir le bien de son prochain, l’aimer tout simplement, voilà ce qu’il nous faut demander à Dieu en toutes circonstances. Que nous soyons rois ou serviteurs, puissants ou faibles, grands ou petits. Pensons-y : l’amour du prochain nous conduit non pas nécessairement à tout approuver, mais, grâce à l’Esprit du Christ, à discerner le trésor qui est en lui ; et ce trésor est toujours de quelque manière la présence de Jésus lui-même. Dès lors, frères et sœurs, l’amour du prochain est bien le plus court chemin vers Jésus, notre vrai et unique trésor.